NELSON, Bill – Practically wired
Bill Nelson est un musicien anglais d’une profonde originalité, peut-être résolument à contre-courant des modes et des tendances. Au début des années 70, il commet son premier album solo, d’un folk décalé et pensif alors que tout le monde fait du hard rock. Puis en 1974, il pose les bases d’un rock arty pré-punk et dandy avec son groupe Be-Bop Deluxe, alors que tout le monde fait du glam. Be-Bop Deluxe étant passé à côté de la gloire pour être sans doute resté un peu trop collé derrière une influence David Bowie, Bill Nelson se replie dans sa petite maison de campagne, crée son propre label et sort des albums aussi confidentiels qu’intéressants à la cadence d’une usine chinoise de téléphones portables.
Revenir sur l’œuvre complète de Bill Nelson nécessiterait des ouvrages complets. Avec près de 70 albums à son actif, Bill Nelson concurrence directement des musiciens stakhanovistes comme Frank Zappa, Tangerine Dream ou les Melvins. Le label Esoteric Recordings égrène de temps à autre quelques-uns des disques de Bill Nelson sur le marché de la réédition. Nous avons eu déjà l’occasion de parler dans ces pages du premier album « Northern dream » ou de « Luminous », sorti en 1991.
Voici aujourd’hui « Practically wired » datant de 1995, et qui possède le sous-titre de « Or how I became a guitar boy ». Les souvenirs d’enfance sont en effet très présents sur ce disque dont la pochette développe une imagerie très années 50, avec images de voitures futuristes ou de pin-ups insouciantes. Bill Nelson a écrit la préface du disque et y parle effectivement de ses premiers émois de jeune guitariste à l’écoute des hits d’Elvis Presley, de Duane Eddy, des Ventures ou des Spotnicks. Il expose également le projet de ce « Practically wired », qui consiste en un album instrumental entièrement dédié à la guitare sous toutes des formes.
Effectivement, Bill Nelson est parti du principe d’écrire, d’enregistrer et de mixer en une quinzaine de jours une quinzaine de titres en n’ayant rien préparé à l’avance. Bill Nelson entre aux studios Fairview en 1994 avec John Spence comme ingénieur du son et en sort deux semaines plus tard avec cet album sous le bras. L’écoute du disque révèle la diversité des ambiances, entre électro-rock énervé (« Roses and rocketships »), rythmiques douillettes et dansantes (« Spinning planet »), délicatesse aquatique (« Thousand fountain island »), piano atmosphérique (« Piano 45 »), groove lancinant (« Pink buddha blues »), tranquillité feutrée et reposante (« Kid with cowboy tie ») ou pilonnage hard rock expérimental (« Royal ghosts »). Chaque morceau possède sa personnalité propre et révèle les nombreux pans de la personnalité musicale de Bill Nelson, insatiable touche-à-tout et expérimentateur patenté.
Bien sûr, entrer abruptement dans cet album sans connaître Bill Nelson et son œuvre musicale aura un peu un effet de douche froide sur l’auditeur non préparé. Il vaut mieux soit déjà connaître Bill Nelson, soit être intrigué par les arcanes fascinants de l’avant-garde et de l’expérimentation sonore pour profiter à plein de cet album. Mais quand on est dedans, la promenade vaut la peine.
Pays: GB
Esoteric Recordings COCD 1004
Sortie: 2012/04/30 (réédition, original 1995)