ARGENT – All together now
Rod Argent tenait l’orgue dans les Zombies, célèbre groupe pop anglais des années 60, à qui l’on doit des chansons imputrescibles comme « She’s not there » ou « Time of the season ». Lorsque ce groupe disparaît en 1968, Argent monte son propre projet avec son cousin Jim Rodford (basse) et deux anciens musiciens des Roulettes, Russ Ballard (guitare) et Robert Henrit (batterie). L’ancien Zombie Chris White reste dans l’entourage du groupe en tant que songwriter et producteur. Cette équipe va réaliser durant la première moitié des années 70 une poignée d’albums de rock progressif souvent marqué par l’énergie des guitares et la puissance de l’orgue.
En 1970, le groupe sort son premier album, intitulé tout simplement « Argent ». Le style reste encore marqué par celui des Zombies mais il s’aventure aussi sur les marches du progressif. Le deuxième album « Ring of hands » (1971) vient confirmer cette tendance et reçoit un accueil favorable de la critique. Mais c’est surtout avec « All together now » que le groupe se fait connaître, notamment grâce à son hit « Hold your head up », écrit par Russ Ballard, guitariste doué et écrivain inspiré. Cette chanson éditée en différentes versions plus ou moins écourtées en raison de sa durée va grimper jusqu’à la cinquième place des charts anglais et américains à la fin de l’année 1971. Quant à l’album « All together now », il se retrouve à la 13e place des charts anglais et à la 23e place du Billboard américain.
Ce disque est assez cohérent dans son ensemble, enchaînant les hymnes progressifs et hard rock comme « I am the dance of ages » ou « Be my lover, be my friend ». Les six minutes de « Hold your head up » et sa rythmique régulière montant peu à peu en puissance ouvrent les débats. Le groupe place également entre deux titres ambitieux des pièces un peu plus simples et retournant aux sources du rock ‘n’ roll binaire (« Keep on rollin' », « He’s a dynamo »). On rencontre aussi l’excellent « Tragedy », titre heavy funk à la guitare désinhibée et aux ambiances rappelant ces bons vieux épisodes de Starsky et Hutch poursuivant le voyou à travers les rues sales de Los Angeles en plein cœur des années 70. L’album se termine sur l’imposant et pompeux « Pure love », pièce de douze minutes en quatre volets qui démarre par un gigantesque solo de grandes orgues que le temps à rendu quelque peu indigeste. Au moment où l’on commence à s’endormir sur les interminables circonvolutions saint-sulpiciennes de Rod Argent (cinq minutes !), la batterie reprend les choses en main, entraînant l’orgue sur un mode plus heavy progressif. Le chant n’apparaît que plus tard, en pleine phase blues lourd fuzzy. Et c’est finalement l’orgue bravache et irritant de Rod Argent qui conclue la dernière minute de cette aventure sonore mi-figue mi-raisin. Signalons que le single « Hold your head up » est sorti en 1971 avec la face B « Closer to heaven », inédite en album. La réédition CD d’Esoteric Recordings ajoute ce morceau en bonus, ce qui permet d’en apprécier le rock chaloupé très marqué par le « Honky tonk woman » des Rolling Stones.
En 1973, le quatrième album « In deep » sort comme les autres sur le label Epic et contient un autre hit, « God gave rock and roll to you », écrit par Russ Ballard et gravitant dans le Top 20 anglais (il sera repris par Kiss en 1992). Fort de son talent de compositeur, Russ Ballard quitte le groupe pour tenter une carrière solo. Il connaîtra un succès massif avec son célèbre « Ridin’ with the angels », archétype de l’hymne biker. Il est remplacé par John Verity et John Grimaldi, qui ne seront pas trop de deux pour compenser son formidable talent. Privé de Ballard, le groupe de Rod Argent fera des albums plus conventionnels, avec beaucoup d’improvisation et une tendance art rock parfois indigeste (« Circus » et « Counterpoints » en 1975). Argent splitte en 1976. Son créateur continue une carrière solo, John Verity formera son John Verity Band et Rodford et Henrit joueront dans un groupe appelé Phoenix avant de rejoindre les Kinks.
Pays: GB
Esoteric Recordings ECLEC 2321
Sortie: 2012/04/30 (réédition, original 1972/07)