TANGERINE DREAM – Electronic meditation
Nous sommes à Berlin à la fin des années 60. Un musicien du nom d’Edgar Froese cherche à casser les codes de la musique pop en formant un groupe ayant pour but de révolutionner les sonorités du moment, s’évadant du carcan des chansons pop sur les filles et les motos limitées à trois minutes. Après avoir connu une première équipe, Tangerine Dream éclate une première fois en 1969. Edgar Froese saisit cette opportunité pour reformer son groupe et lui donner une orientation résolument avant-gardiste. Il s’associe avec un musicien britannique, Steve Jolliffe, et se met en recherche d’un batteur. Après quelques tentatives infructueuses, il met la main sur un jeune batteur de 21 ans, Klaus Schulze. La formation se stabilise enfin avec l’arrivée de Conrad Schnitzler qui remplace un Steve Jolliffe retourné en Angleterre.
Tangerine Dream s’aventure dans quelques festivals où son bruit expérimental désarçonne le public. Son passage au Pop & Blues Festival d’Essen en octobre 1969 est une sorte de baptême du feu pour Tangerine Dream, totalement incompris du public à l’époque. Par un concours de circonstances, une séance d’improvisation dans un petit studio est enregistrée à l’insu du groupe et les bandes sont envoyées au label Ohr qui propose un contrat au groupe. Tout étonné, Edgar Froese accepte et c’est le début de la carrière discographique de Tangerine Dream avec son premier album « Electronic meditation » qui sort en juin 1970.
Pour réaliser ces premiers titres, les hommes de Tangerine Dream ont eu recours non seulement à des instruments classiques (batterie, guitares et un petit orgue Farfisa qui n’annonce pas encore l’impressionnante armée de synthétiseurs que le groupe utilisera par la suite) mais aussi à des objets de la vie courante, comme une passoire remplie de haricots secs, du papier à brûler, des barres de fer… Edgar Froese passe même un rasoir électrique sur les cordes de sa guitare afin d’obtenir des effets toujours plus insensés.
« Electronic meditation » a souvent été peu apprécié des amateurs de Tangerine Dream, qui y voient un disque embryonnaire du style futur du groupe, mais à leur goût encore considérablement éloigné de la musique électronique. Il est clair que ce premier album sonne davantage rock qu’électronique mais il doit être regardé comme d’une importance capitale pour l’évolution du rock allemand. « Electronic meditation » pose les bases de ce que sera le krautrock en établissant un carrefour ouvrant sur deux voies : celle du rock expérimental et celle de la musique électronique planante. Ce disque arrive parmi les premiers du genre, juste un peu après les premiers albums d’Amon Düül II et Can, qui sont avec Tangerine Dream le trio de tête menant le peloton des groupes allemands qui vont inonder le marché underground européen à partir de 1970. « Electronic meditation » se compose de cinq titres oscillant entre trois et douze minutes, ce qui en fait un album abordable, mais cependant habité d’une foule d’effets sonores, de ruptures d’ambiance et de longues improvisations où s’entremêlent orgue, guitare et batterie. Ces deux derniers instruments connaîtront une utilisation plus restreinte sur les futurs albums de Tangerine Dream et quand on sait que c’est le légendaire Klaus Schulze qui tient les baguettes, cela apporte encore plus de valeur à ce disque.
Le magazine allemand Sounds décrit cet album comme « une excursion électronique dans un nirvana stéréophonique, le genre d’album que vous adorez un soir et qui vous ennuie à mourir le soir suivant ». Le premier album de Tangerine Dream, s’il ne rencontre pas un succès commercial évident, termine tout de même à la cinquième place du classement annuel fait par ce magazine.
Au moment où « Electronic meditation » sort, Klaus Schulze a déjà quitté Tangerine Dream. Il rejoint Ash Ra Tempel avant d’entamer la carrière solo que l’on sait. Edgar Froese continue alors son groupe avec l’aide de Christopher Franke et Steve Schroyder, plus tard remplacé par Peter Baumann. Les albums suivants du groupe, « Alpha Centauri » (1971) et surtout « Zeit » (1972) inaugurent la carrière électronique d’un groupe devenu avec le temps une référence incontournable du genre.
Pays: DE
Reactive EREACD 1025
Sortie: 2012/03/26 (réédition, original 1970)