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BOND, Grahame – Love Is the Law

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Considéré comme un des pionniers du Blues anglais, Graham Bond est né en 1937 dans l’Essex. Après des études musicales, il débute comme saxophoniste dans le groupe de Jazz de Don Rendell. En 1962, il intègre le Blues Incorporated d’Alexis Corner, qui comprend notamment Jack Bruce et Ginger Baker. Dès 1963, il les débauche pour former un trio, qui devient le Graham Bond Quartet avec l’adjonction du guitariste John McLaughlin. Suite à son départ provoqué par le teigneux batteur et l’arrivée début 1964 du saxophoniste Dick Heckstall-Smith, voulue par le même teigneux, il se transforme en Graham Bond Organization. L’originalité de leur musique tient à la fois dans le mélange inhabituel de Jazz, de Blues et de Rhythm ‘n’ Blues, dans la voix particulière de Bond, dans les sonorités nouvelles de l’orgue bien mises en valeur, et dans le jeu remarquable des quatre instrumentistes. Il faut aussi savoir que Graham Bond fut un des premiers à utiliser l’orgue Hammond auquel il adapta même d’autres matériels, à se monter un clavier électronique, et à se servir d’un mellotron. Si le quatuor se constitue un public fidèle sur scène, il ne parvient pas vraiment à décoller au niveau des ventes malgré deux excellents albums publiés en 1965, « The Sound of 65 » et « There’s a Bond Between Us ». En 1966, une altercation entre Ginger Baker et Jack Bruce lors d’un concert tourne au pugilat sur scène. Si le premier vire le second après de sérieuses menaces, les deux se retrouvent dans Cream peu de temps après. Jon Hiseman remplace Ginger Baker.

À cette époque déjà, Graham Bond a déjà perdu le contrôle de sa vie. L’usage intensif de drogues dures l’a rendu instable et peu fiable. Il peut passer de l’euphorie totale à la dépression suicidaire. En 1967, il met fin au groupe et poursuit sa route sous différentes dénominations, avec différents musiciens, sans retrouver l’impact des débuts. De leur côté, Jon Hiseman et Dick Heckstall-smith forment Colosseum l’année suivante.

En 1968, suite à un contrat avec Mercury Records, l’opportunité de partir aux États-Unis s’offre à lui. Il foire rapidement l’affaire, mais reste aux États-Unis. Il y joue avec quelques célébrités, dont Doctor John, Jefferson Airplane et Jimi Hendrix. Il peut aussi enregistrer un album pour le petit label américain Pulsar, « Love Is the Law ». Les conditions de départ ne sont pas idéales, car les moyens sont réduits.

Pour cet enregistrement, il se charge de tous les instruments, excepté la batterie. Il n’obtient la collaboration du réputé Hal Blaine (Elvis Presley, Sam Cooke, Gerry Mulligan, les Beach Boys, les Monkees, …) qu’en lui racontant d’énormes salades. Aux chœurs, il utilise l’excellente Diane Stewart qu’il vient d’épouser et qui le suivra dans ses galères quelques années durant.

À l’écoute, l’album contient de fort bonnes choses. Même s’il reste encore profondément ancré dans le style qui a fait sa renommée, son nouvel environnement commence à l’ouvrir vers d’autres voies plus en ligne avec l’époque. Peu avant son départ, il s’était d’ailleurs quelques fois retrouvé à la même affiche que des formations Psychédéliques et Progressives. En tout cas, l’Anglais déploie ici tous ses talents d’instrumentiste, de chanteur et de compositeur. Au contraire du saxophone, il utilise l’orgue intensivement. Force, profondeur et chaleur se côtoient lors de magistrales envolées en solo ou en soutien du chant. Comme d’habitude, la voix reste poignante, toujours imprégnée de Rhythm & Blues, éraillée bien qu’un rien plus raboteuse. L’homme est ici plutôt bavard. Devant la symbiose parfaite entre le chant et l’orgue, on frissonne de plaisir. Fortement marqué par le Jazz, volontiers audacieux et flamboyant, le batteur ne fait regretter aucun de ses prédécesseurs.

Parmi tous ces titres, « The Naz » ressort comme le plus percutant et en définitive, le meilleur. Bond y est étincelant à l’orgue et, surtout, au saxophone qu’il met en vedette. Étonnant malgré tout, car il s’agit d’un titre instrumental, le seul avec « Sun Dance », d’un bon niveau également, souvenir de l’Organization.

D’autres, comme « Love Is the Law », avec le mellotron, « Moving Towards the Light », les rythmés « Crossroads of Time » et « Strange Times, Sad Times », riches au niveau vocal grâce à l’apport de Diane Stewart, l’hypnotique « Our Love Will Come Shining Through » et le Jazzy « I Couldn’t Stand It Anymore », tous deux avec un impressionnant batteur, soutiennent sans difficulté la comparaison avec le passé. Ils plaisent par ce mélange savoureux, cette intégration parfaite des instruments et de la voix.

Intéressant également, « The Bad News Blues » pénètre plus profondément le Jazz-Blues anglais typique de ses débuts.

Au final, cet album ne rencontra que peu d’intérêt aux États-Unis et en Grande-Bretagne où il ne fut même pas distribué immédiatement. La promotion ne fut pas idéale non plus. Clairement, cet album de transition ne s’intégrait pas au mieux dans son temps. Avec le recul, en dehors des effets de modes, ses indéniables qualités méritent qu’on s’y attarde, car, sans conteste, cet album fut honteusement mésestimé.

Les titres (38’08) :

  1. Love Is the Law (4’39)
  2. Moving Towards the Light (4’36)
  3. Our Love Will Come Shining Through (3’10)
  4. I Couldn’t Stand It Anymore (4’14)
  5. Sun Dance (2’30)
  6. Crossroads of Time (2’39)
  7. Bad News Blues (2’53)
  8. Strange Times, Sad Times (4’05)
  9. The Naz (5’19)
  10. The World Will Soon Be Free (4’03)

Les interprètes :

  • Graham Bond : Claviers, Orgue, Saxophones, Basse, Chant & Compositions
  • Hal Blaine : Batterie
  • Diane Stewart : Chœurs

Pays: GB
Esoteric Recordings ECLEC2239
Sortie: 2011/01/31 (réédition, original 1968)

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