KRAVITZ, Lenny – Baptism
Lenny Kravitz vient d’avoir 40 ans le 26 mai. Ce CD sort un peu du scope habituel du site mais il n’est pas possible d’ignorer un artiste de cette qualité. Grand admirateur de Stevie Wonder, de Jimi Hendrix (plus pour l’âme qu’il met dans ses chansons que pour son jeu de guitare) et de Prince, il collabore pourtant avec tout ce qui se fait de mieux en matière de musique rock et nombreux sont ceux qui font appel à lui.
Parmi ceux-ci, il y a Mick Jagger, jamais avare d’interviews. Lors de la confection de son dernier album, « Goddess In The Doorway » (2001), il s’est adressé à lui pour « God Gave Me Everything » et s’est rendu dans son studio. Quand il est arrivé sur place, TOUT était prêt : les instruments étaient enregistrés, y compris la batterie, les orchestrations et les arrangements faits. Il ne lui restait presque plus qu’à brancher le micro et chanter. Comment ne pas s’incliner devant un tel professionnalisme ?
Sur cet album, mélange de funk, de soul, de reggae, de ballades, il montre sa capacité énorme à diversifier ses sources et cela se traduit par une grande versatilité. Passé maître dans l’art de traduire tout ça en une musique très rythmée, il ne se départit jamais d’une parfaite mesure. « Le génie réside dans la simplicité », aime-t-il dire.
« Minister Of Rock ‘n’ Roll » est un rock teinté de funk où Kravitz agrémente le tout d’effets divers qui nuisent un peu au morceau, qui en devient confus. Il chante et joue tous les instruments : guitare électrique, guitare acoustique, basse, batterie, piano, moog et mellotron. Excusez du peu. Mais c’est pareil pratiquement sur tous les autres titres, dont « I Don’t Want To Be A Star », déjà connu par les passages radio. Un beau solo de guitare termine le morceau, juste avant qu’une voix nasillarde super énervante n’invite à l’écoute de la plage suivante.
« Lady » est plus à classer dans les titres de style funky. Très rythmé, il ravira les amateurs du genre. Ici, il reçoit un coup de main de Craig Ross à la guitare électrique, à la batterie et au piano, de Henry Hirsch à la basse et de David Baron au saxophone baryton. C’est assez rare pour être souligné. « Calling All Angels » se déroule sur un tempo très lent et c’est une très belle ballade qui apporte une diversion parmi les autres plages. C’est d’ailleurs un des meilleurs titres de l’album. Une fois de plus, il se charge de tout (enfin, presque tout).
C’est pareil sur « California », un autre très bon titre, bien plus musclé que le précédent. C’est surtout ainsi qu’on aime Lenny Kravitz : quand sa musique rock déménage. Généralement, quand il compose, il part de la batterie et les autres instruments viennent se greffer dessus. Très différent, sur un rythme lancinant, « Sistamamalover » rappelle Prince comme ce n’est pas permis. Ici, Craig Ross lui donne un coup de main à la guitare.
Composé par Lenny Kravitz et Craig Ross, « Where Are We Runnin’? » est aussi un morceau imparable, beaucoup plus rock, dont les riffs rappellent un peu « Running Too Deep » de Keith Richards (« Main Offender », 1992). Même s’il cite plus volontiers Stevie Wonder, les Rolling Stones comptent aussi parmi ses influences les plus marquantes.
Nouvelle ballade intimiste agréable, « Baptized », où on remarque l’absence de basse, se décline sur un rythme assez lent, bien soutenu en background par la formidable voix de Tawatha Agee. Avec David Sanborn au sax, « Flash » est aussi un morceau beaucoup plus musclé. Craig Ross y joue le solo de guitare. Comme à l’accoutumée, Kravitz se charge du reste.
Même remarquable line-up sur « What Did I Do With My Life? » mais Ross tient la guitare électrique et ne joue pas seulement le solo. De plus, le tempo est complètement différent et le climat de cette ballade est beaucoup plus intimiste. Sur « Storm », titre rap, on reconnaît la patte (et surtout la voix) de Jay-Z mais ça reste marqué du sceau Kravitz.
Autre ballade triste, autre belle mélodie, autre réussite avec « The Other Side » mais Craig Ross tient la guitare électrique et David Sanborn joue du saxophone. C’est de nouveau un morceau intimiste qui se laisse écouter agréablement. Lenny Kravitz attache d’ailleurs énormément d’importance à la mélodie. Enfin, « Destiny », avec Lenny Kravitz au chant, accompagné par sa seule guitare acoustique, clôture l’album en beauté par une ballade fort pareille à la précédente à la fois dans le ton et dans le questionnement : quelles sont mes racines ? Quel est, finalement, le sens de ma vie ? C’est ma destinée.
C’est sur cette conclusion très fataliste que se termine ce CD dont la variété montre, s’il en était encore besoin, toute l’étendue du talent de Lenny Kravitz, qui peut tout faire. Ses admirateurs vont se régaler, même s’il a déjà fait mieux. Il serait injuste de ne pas signaler les très belles photos de Mark Seliger, notamment en noir et blanc.
Pays: US
Virgin / EMI 7243 5 77957 2 2
Sortie: 2004/05/18