DELUGE GRANDER – August in the Urals
Cette formation américaine, de la région de Baltimore, publie ici son premier album. Le fondateur en est le claviériste Dan Britton, (ex- ?) membre de Cerebus Effect, dont il a débauché le batteur Patrick Gaffney. Cerebus Effect avait publié l’année dernière un album prometteur, de style « Jazz-Rock Progressif », « Acts of Deception ».
Pour situer les choses, le Maître d’œuvre de Deluge Grander cite Christian Vander comme artiste favori. Dans le même exercice, mais pour les albums, il place « Retrospektiw I and II » de Magma en tête, suivi de quatre autres de Genesis, avec d’abord « The Lamb Lies Down on Broadway » et « Selling England by the Pound ». A dire vrai, si « August in the Urals » intègre ces influences, celles de King Crimson et de Yes ne sont pas à négliger. A l’écoute, il paraît vite évident que toutes se marient ici avec bonheur.
L’œuvre est ambitieuse, complexe et sophistiquée, toujours défendue par une interprétation irréprochable. Les claviers mènent la danse et impriment la coloration « Progressive » de l’ensemble. Ils produisent un riche patchwork de sonorités et d’atmosphères. Les guitares complètent l’ouvrage avec goût, mais sans réelle flamboyance, jusqu’à l’explosion notable des derniers titres où Dave Berggren affiche plus nettement l’étendue de ses potentialités. Le chant est sombre et solennel, un peu forcé et d’une qualité moyenne, mais bien en osmose avec l’œuvre. Il reste malgré tout globalement secondaire. La rythmique est impeccable, imprégnée tour à tour de « Fusion » et de « Progressif ». La basse est bien marquée et les percussions dynamiques.
Les titres (71’01) :
- « Inaugural Bash » (Britton/Berggren/Gaffney) (26’57)
- « August in the Urals » (Britton/d’Anon) (15’52)
- « Abandoned Mansion Afternoon » (Britton) (12’14)
- « A Squirrel » (Britton/Berggren) (8’45)
- « The Solitude of Miranda » (Britton) (7’18)
Les Musiciens :
- Dan Britton : Claviers, Guitares (2, 5) & Vocaux (1, 2, 3)
- Dave Berggren : Guitares (1, 3, 4, 5)
- Patrick Gaffney : Batterie
- Brett d’Anon : Basse & Oud (1, 2, 3, 4)
+ - Frank d’Anon : Xylophone, Trompette, Flûte & Claviers (1, 5)
- Jeff Suzdal : Saxophones (1)
- Adnarim Dadelos : Vocaux (5)
« Inaugural Bash » est constitué de bric et de broc. Il comprend sept parties distingues, créées au fil du temps, sans ordre bien précis, par Dan Britton. L’assemblage de ce puzzle apparaît sans heurts malencontreux, grâce aussi à la contribution des nouveaux membres du groupe et de quelques proches. Tout cela confère à cette longue pièce une grande richesse instrumentale, ainsi qu’une diversité de tons et de rythmes. Toutes les tendances du « Progressif » citées plus haut y sont représentées. Le dernier tiers, le seul avec une partie de vocaux, est sublime, évoluant dans le grandiose et le cérémonial.
Tout aussi palpitant, « Augusts in the Urals » garde le solennel dans les vocaux. Les claviers englobent des modèles comme King Crimson, Yes ou même Erik Norlander. Dan Britton prouve qu’en plus de ses compétences aux claviers, il n’est pas manchot aux guitares, filant même dans l’un ou l’autre solo bien trempé. La rondeur de la basse ne l’empêche jamais d’être cinglante. L’utilisation intensive des cymbales par un batteur très en verve parachève en beauté le travail rythmique.
« Abandoned Mansion Afternoon » reste du même tonneau que le précédent, vocaux compris. A la guitare, Dave Berggren travaille par petites touches fines et Brett d’Anon suit clairement les traces de Chris Squire. Un peu moins axé sur les cymbales, Patrick Gaffney imprime un ton plus sec aux percussions.
Sans vocaux, « A squirrel » se fonde sur la longue évolution en parallèle du duo Dan Britton et Dave Berggren, ses compositeurs communs. Basse et batterie s’intègrent pas à pas dans cette mécanique, s’entrecroisant avec délectation. Un petit chef-d’œuvre !
L’hispanisant « The Solitude of Miranda » hausse encore le niveau d’un cran, tout en poursuivant le schéma de la pièce précédente, avec un équilibre identique entre les instruments. Tout cela reste toujours d’une grande fluidité. En définitive, du Return to Forever, époque Al Di Meola, mais dans la veine « Progressive ». L’intervention des vocaux est plus qu’anecdotique.
En résumé, un excellent album qui ravira tant les amateurs de « Rock Progressif » ambitieux que ceux qui évoluent aux marches du « Jazz-Rock ». Si les références restent franchement ancrées dans les « Seventies », le modernisme de Deluge Grander n’apparaît jamais discutable.
Dans un autre registre, la réussite esthétique de ce CD et de son livret est remarquable.
Pays: US
Emkog 001
Sortie: 2006/10/04