PESS – You can make hamburger yourself
L’album de ce groupe japonais nous permet de découvrir un genre typique de ce pays, le Shibuya-kei. Ce style vient du quartier de Shibuya à Tokyo, où il se développe à la fin des années 60 sous l’influence d’une multitude de genres, pop française à la Gainsbourg (très influent dans ce genre), mais également bossa nova, lounge, yé-yé, pop baroque, soul pop, etc. On obtient un style de pop japonaise à haute énergie, qui n’a pas peur du kitsch et qui n’a rien à voir avec le pessimisme occidental.
Le Shibuya-kei connaît ses moments de gloire au Pays du Soleil Levant au milieu des années 1990, avec des formations comme Buffalo Daughter, Fantastic Plastic Machine, MEG, Pizzicato Five, Towa Tei ou Citrus. Ce dernier groupe est écouté en boucle par deux musiciens japonais, Mitsuomi et Haruka, qui finissent par se rencontrer sur les réseaux sociaux et décident de former le duo Pess en 2019.
Mitsuomi et Haruka revendiquent également des influences en provenance de Sports Team, Pet Shimmers, Peel Dream Magazine, The Big Moon, Men I Trust, Frankie Cosmos, Pixx, Jackie Mendoza, Hatchie, Girlseeker et Neo Acoustic, autant de groupes ou artistes synth pop ou dream pop d’Europe ou d’Amérique dont je n’avais aucune idée de l’existence.
Nos deux musiciens se mettent à échanger des pistes musicales à distance et prennent l’habitude de travailler ainsi. Ça tombe bien puisque le travail à distance devient subitement à la mode à partir de mars 2020. Mitsuomi et Haruka ne se rencontrent en tout et pour tout qu’une seule fois au cours de la préparation de leur album, dont le titre idiot ʺYou can make hamburger yourselfʺ ne doit pas rebuter l’auditeur qui voudrait s’aventurer dans leur album parce que du point de vue des sensations fortes, il sera servi au-delà de ses espérances.
La seule chose que l’on puisse finalement reprocher à ce disque, c’est sa brièveté : 23 minutes pour sept morceaux, c’est du vite fait vite dit. Mais on rattrape en énergie ce que l’on perd en distance car nous avons ici une petite collection de titres pétaradants, où la voix de la chanteuse Haruka glisse avec élégance et force sur un flot de rythmes puissants et dansants, ce qui est la marque de fabrique du Shibuya-kei. Le démarrage exercé par le premier morceau ʺYou can make hamburger yourselfʺ, suivi de ʺDream spinʺ ou l’excellent ʺRoller coasterʺ, donne une irrésistible envie de remuer le popotin en se jetant partout comme des pandas crétins. Par moments, on croit entendre du Deerhoof, ce qui n’est pas étonnant quand on connaît les origines japonaises de la chanteuse de ce groupe américain.
La seconde partie d’album est un rien plus calme mais elle conserve toujours ce côté scintillant et insouciant qui nous rappelle que les Japonais sont un peuple extraordinaire à plus d’un titre. Dans les derniers instants du disque, ʺPixelʺ se révèle d’une douceur et d’une intensité fascinantes. Voilà qui donne envie de se tourner davantage vers le Japon et de découvrir cette scène particulière qu’est le Shibuya-kei, dont les ramifications pourraient ouvrir à des tas de choses extraordinaires.
Le groupe :
Mitsuomi (tous les instruments)
Haruka (chant)
L’album :
ʺYou Can Make Hamburger Yourselfʺ 2:52
ʺDream Spinʺ 4:00
ʺRoller Coasterʺ 2:14
ʺHieroglyphʺ 2:07
ʺWind of Juneʺ 4:10
ʺPixelʺ 5:23
ʺThrow It Awayʺ 2:28
https://aagoo.bandcamp.com/album/pess-you-can-make-hamburger-yourself
Pays: JP
Aagoo Records
Sortie: 2021/11/26