OVTRENOIR – Fields of fire
Quatre ans, c’est long, surtout pour un groupe qui débute avec un EP en 2016 et qui ne sort son premier album qu’en 2020. Quatre ans, c’est d’autant plus long qu’il y avait bien des motifs d’être impatient dans l’attente d’une suite à ce premier EP ʺErodedʺ qui avait fait beaucoup de promesses avec son sludge metal / postcore tout à fait déprimant et massif. Le label Consouling Sounds, qui avait découvert avec brio ce combo parisien bien doté en talent a failli se demander s’il n’avait pas choisi un feu de paille en signant Ovtrenoir mais heureusement, le groupe de William Lacalmontie (guitare et chant), Angéline Seguelas (basse), Julien Taubregeas (batterie) et DehnSora (guitare) est revenu des profondeurs du temps pour marquer à nouveau les esprits avec ce premier album.
Le résumé de ce premier opus long format tient en un mot : énorme. Si Ovtrenoir ne s’affiche pas comme un modèle d’originalité dans le genre très codé du sludge metal, il se distingue par contre avec une formidable capacité à façonner le son pour lui donner une puissance et une force dévastatrices. Les gigantesques nappes de guitares phénoménalement lourdes et épaisses qui s’abattent sur notre cortex cérébral emportent tout sur leur passage. C’est une lente coulée de riffs granitiques et colossaux qui envahit tout l’espace sonore, au bénéfice d’une ampleur déconcertante. Là-dessus, un chant pleureur résolument monocorde et perché assez haut vient nous déverser des hectolitres de chagrin poisseux et désabusé sur les chaussures, tant est si bien qu’on ne sait plus si on doit appeler l’asile psychiatrique ou les pompiers pour demander du secours.
L’architecture de l’album tient en deux vagues surpuissantes séparées par un titre un peu plus calme en son milieu. La première phase écrase la tête et les cervicales et la deuxième phase empêche le tout de repousser. Le premier trio de chansons ʺPhantom painʺ, ʺWiresʺ et surtout ʺEchoesʺ nous roule dessus avec la majesté d’un régiment de trolls en partance pour les terres du Mordor. Les rythmiques martiales et les montagnes de riffs ont tout aplani mais l’auditeur qui sort de son trou a un peu le temps de faire le point sur ce qui vient de lui arriver en écoutant ʺKept afloatʺ, petite digression un peu plus légère permettant de reprendre son souffle et de reconstituer sa colonne vertébrale.
Puis c’est au tour de la seconde couche de venir ensevelir les tympans survivants sous un bétonnage de sons babyloniens. Ici, c’est une roborative paire de deux morceaux affichés à sept minutes de durée qui dévastent à nouveau l’environnement sonore. ʺThose scars are landmarksʺ et ʺI made my heart a field of fireʺ conservent cette ligne grasse et poisseuse cherchant toujours à s’élever vers le ciel à partir d’une fange noire et gluante, occasionnant de magnifiques poussées telluriques. Pour finir, le dernier morceau ʺSlumberʺ ne s’éloigne pas vraiment de cette puissante ligne sonore et achève la parfaite cohérence de cet album.
Monolithique, rugueux, d’une exemplaire puissance sonore, ʺFields of fireʺ est une sculpture massive et froide qui domine les étangs boueux du sludge metal. Les Français d’Ovtrenoir réalisent ici un coup de maître qui leur gagnera certainement un public mais qui pose aussi une question inquiétante : pourront-ils faire mieux la prochaine fois ? On l’espère de tout cœur.
Le groupe :
William Lacalmontie (guitare et chant)
Angéline Seguelas (basse)
Julien Taubregeas (batterie)
DehnSora (guitare)
L’album :
ʺPhantom Painʺ 5:32
ʺWiresʺ 4:11
ʺEchoesʺ 8:24
ʺKept Afloatʺ 4:27
ʺThose Scars Are Landmarksʺ 7:17
ʺI Made My Heart a Field of Fireʺ 7:05
ʺSlumberʺ 4:45
https://ovtrenoir.bandcamp.com/album/fields-of-fire
https://www.facebook.com/ovtrenoir/
Pays: FR
Consouling Sounds
Sortie: 2020/10/23