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NAUFRAGÉS DU SILENCE, Les – Orphée

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Plutôt que de parler de Naufragés du Silence, on devrait plutôt qualifier ce groupe bruxellois de Naufragés du Temps, ou de Naufragés tout court, en fait. Parce qu’en matière de rendez-vous manqués, de chances loupées, de passages inaperçus et de patience, les Naufragés du Silence sont les champions toutes catégories. Imaginez que ce groupe sort enfin son premier album long format après s’être formé… en 1984.

Bon, on va rassembler ses esprits tranquillement et essayer de comprendre comment un groupe a mariné 37 années avant de pouvoir se faire entendre sérieusement. Les choses commencent donc au milieu des années 1980, en pleine époque new wave et les Naufragés du Silence décident de se lancer à la conquête de la gloire en tentant de rivaliser avec ses modèles Indochine, Marquis de Sade, Marc Seberg, Etienne Daho ou Taxi Girl, c’est-à-dire des groupes d’expression française. Car ce qui fait la force des Naufragés du Silence, ce sont les textes, joliment tourmentés et poétiques. À un moment, la sauce prend et le groupe se retrouve dans des tournées et des participations à des festivals qui auraient pu renforcer son exposition médiatique. On le voit en ouverture de Marc Seberg ou de Sad Lovers & Giants, mythique groupe post-punk du sud de l’Angleterre. Il est également présent à la première édition du festival de Dour en 1988, après avoir été l’objet d’une émission de Radio 21 animée par Jacques de Pierpont fin 1987. Les choses se déroulent correctement avec la parution de deux singles, ʺSoldat / Astronauteʺ (1987) et ʺLa ronde des fous / L’alchimisteʺ (1988). Mais l’alchimie ne tarde pas à tourner court et les Naufragés du Silence perdent peu à peu le contact avec la petite notoriété qu’il avait commencé à faire pousser. En 1994, une compilation éponyme avec une bonne douzaine de chansons inédites sort mais elle est distribuée dans des conditions indigentes.

On voit ressurgir brièvement les Naufragés du Silence lors d’un concert de reformation en avril 2008 à Rixensart, pas forcément l’endroit le plus stratégique pour rassembler des centaines de milliers de fans. Et les Naufragés continuent de voguer sur leur radeau, bien que certains d’entre eux ont mené une carrière parallèle plus rémunératrice, comme Benoit Deschuyteneer qui forme Plasticine ou surtout Michael Hasson qui forme l’excellent Ghinzu.

Mais l’obstination est plus forte que tout et les Naufragés du Silence reformés finissent par accoucher de leur premier véritable album. Et vous savez quoi ? Ce disque était prévu pour sortir en mars 2020, précisément au moment où la grande pandémie planétaire éclate et renvoie tout le monde dans ses foyers. En matière de poisse, on touche ici au grandiose. Cependant, des hommes des Naufragés du Silence sont des entêtés et ils reprennent la campagne de promotion de leur album, afin de lui donner une deuxième chance.

Cette deuxième chance, nous allons faire tous les efforts possibles dans la mesure de nos petits moyens pour la faire naître, en soutenant très favorablement cet album, qui allie pop rock un peu new wave dans l’esprit et chanson française, avec de jolis textes rêveurs (ʺOrphéeʺ), des petites histoires de tous les jours sur des peintres malchanceux (ʺParis sous la pluieʺ) ou des crimes sordides (ʺLes bas-fondsʺ), ou des portraits d’endroits improbables (ʺAutumnʺ, ʺDans l’usine en hiverʺ). On y trouve aussi des chansons d’amour (ʺLa perleʺ, ʺNemeresisʺ) mais c’est surtout ʺLe parfum de la défaiteʺ qui illustre particulièrement le destin de ce groupe qui n’a pas eu de chance et qui semble parler ici d’un sujet qu’il maitrise parfaitement. Mais non, on ne souhaite pas une autre défaite aux Naufragés du Silence, qui jouent une musique aux sonorités Eighties très marquées. On croirait en effet qu’ils ont volé par-dessus les trente dernières années sans garder la moindre influence postérieure à 1987. Pensez à Jean-Louis Murat, Etienne Daho, les Innocents, les Ablettes ou Thomas Fersen pour apprécier pleinement cette sympathique collection de chansons graciles et distinguées.

Le groupe :

Benoit Deschuiteneer (basse)
Jean Vanneste (chant)
Joe Bacart (batterie)
Michaël Hasson (guitare)
Peter Soldan (claviers)

L’album :

ʺOrphéeʺ (4:21)
ʺParis sous la pluieʺ (4:14)
ʺAutumnʺ (3:29)
ʺLa perleʺ (3:34)
ʺDans l’usine en hiverʺ (3:53)
ʺLes bas-fondsʺ (3:59)
ʺL’instant fragileʺ (3:50)
ʺLe goût de la défaiteʺ (4:21)
ʺNemeresisʺ (3:58)
ʺLe voyage de Raspoutineʺ (1:42)

https://www.facebook.com/naufragesdusilence

Pays: BE
Autoproduction
Sortie: 2020/03/06

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