NAPALM DEATH – Throes of joy in the jaws of defeatism
C’est avec les cervicales endolories, la paume des mains rougie à force de taper sur la table, les yeux injectés de sang à force de hurler et par conséquent avec les cordes vocales encore fumantes que je referme l’écoute du dernier album de Napalm Death, ʺThroes of joy in the jaws of defeatismʺ. Avec à nouveau cette question lancinante : ʺComment un groupe qui fêtera l’année prochain ses 40 ans d’existence peut-il encore être aussi puissant, aussi dévastateur, aussi colérique qu’aux temps de ses débuts?ʺ. Car il est clair qu’ici, Shane Embury (guitare, 52 ans), Mitch Harris (guitare, 50 ans), Mark ʺBarneyʺ Greenway (chant, 51 ans) et Danny Herrera (batterie, 50 ans) ont toujours la hargne et la rage d’adolescents laissés-pour-compte, de chômeurs crevant de faim ou d’opprimés réclamant justice. Euh, vous allez me dire, au sujet de l’âge des protagonistes, qu’ils auraient formé Napalm Death alors qu’ils avaient 10 ans, puisque le groupe va en avoir 40? Je vous répondrai que Napalm Death est un de ces rares groupes à ne posséder aucun de ses membres originaux, puisque tous les musiciens qui étaient là en 1981 se sont barrés et que c’est finalement Shane Embury qui a pris sur lui de continuer le groupe après son arrivée en 1987.
Mais on ne va pas s’appesantir trop longtemps sur l’histoire, bien connue, de Napalm Death, son album fondamental ʺScumʺ (1987), sa paternité du genre grindcore, son endurance et sa survie à toutes les modes ou péripéties du métal. On va plutôt aller à l’essentiel et rappeler que le groupe de Birmingham connaît depuis ces dernières années un véritable état de grâce avec une série d’albums miraculeux : ʺThe code is red… Long live the codeʺ (2005), ʺSmear campaignʺ (2006), ʺTime waits for no slaveʺ (2009), ʺUtilitarianʺ (2012), ʺApex predator – Easy meatʺ (2015), la compilation ʺCoded smears and uncommon slursʺ (2018). Cette excellente forme se déploie toujours sous les auspices du label Century Media, qui a récupéré Napalm Death dans son écurie en 2005 et qui continue à lui faire confiance depuis.
Le label peut dormir sur ses deux oreilles en laissant batifoler Napalm Death sur ses terrains de chasse préférés. Avec ʺThroes of joy in the jaws of defeatismʺ, le quatuor maudit livre une nouvelle galette de titres hallucinants, bouleversants de violence, implacables dans la science du décibel qui tue. Tout le monde semble sortir d’une cure d’hormones de croissance, tant l’habileté sur les instruments et la rudesse du chant semblent être l’apanage d’une jeunesse au plus haut de sa forme. Les choses sont simples : de ʺFuck the factoidʺ jusqu’à ʺA bellyful of salt and spleenʺ, ce sont 42 minutes de violence ultime, de vélocité indépassable, de fracas de riffs bourrins et de rythmiques supersoniques qui nous descendent sur la couenne pour ne rien laisser debout après la razzia. Parmi cette horde, des morceaux se détachent quand même du lot par leur puissance thermonucléaire. ʺContagionʺ vient de réduire mon bureau en poussière. Puis c’est ʺZero gravitas chamberʺ qui vient de souffler toute ma maison alors que ʺFluxing of the muscleʺ est en train d’aplatir tout le quartier. Emergeant des ruines fumantes, les infortunés habitants peuvent encore calmer leur crise d’angoisse avec les rythmes un peu plus ralentis du final ʺA bellyful of salt and spleenʺ mais les terrifiantes imprécations qui surgissent de ce morceau ne sont pas là non plus pour rassurer.
Oubliez tous les petits boutonneux qui tentent de vous effrayer avec du metalcore de synthèse ou du deathcore frelaté. Faite confiance aux vieux fabricants qui savent décidément mieux que tout le monde usiner les meilleures balles de mitrailleuse dans les vieilles forges. Et dans le domaine, le dernier album de Napalm Death sera la tuerie indispensable à se procurer pour faire trembler les murs et énerver les voisins de palier qui écoutent Ed Sheeran.
Le groupe :
Shane Embury (guitare)
Mitch Harris (guitare)
Mark ʺBarneyʺ Greenway (chant)
Danny Herrera (batterie)
L’album :
ʺFuck the Factoidʺ (02:27)
ʺBacklash Just Becauseʺ (02:56
ʺThat Curse of Being in Thrallʺ (03:36
ʺContagionʺ (04:05
ʺJoie de ne pas vivreʺ (02:28)
ʺInvigorating Clutchʺ (04:05)
ʺZero Gravitas Chamberʺ (04:03
ʺFluxing of the Muscleʺ (04:33)
ʺAmoralʺ (03:05
ʺThroes of Joy in the Jaws of Defeatismʺ (02:55
ʺActing in Gouged Faithʺ (03:37)
ʺA Bellyful of Salt and Spleenʺ (04:36)
https://www.facebook.com/officialnapalmdeath/
Pays: GB
Century Media
Sortie: 2020/09/18