LAST OF LUCY, The – Moksha
Huntington Beach, au sud de Los Angeles, est un quartier paradisiaque pour millionnaires bobos. Mais certains, au lieu d’aller se dorer la couenne à la plage, préfèrent rester dans leur cave, loin du soleil, pour se livrer à l’infernale musique chère à nos oreilles qu’on appelle le métal. On connaissait bien sûr Slayer comme originaire de cette charmante cité mais il semble que les vieux maîtres du thrash metal aient fait des petits avec ces poussins cannibales qui ont pour nom The Last Of Lucy. Cependant, avec ce groupe, il ne sera pas question de thrash metal mais de death metal technique. Et quand je dis technique, c’est technique.
Le guitariste Gad Gidon est le créateur et unique survivant de la première mouture de The Last Of Lucy, mise en place en décembre 2007. Avec Joe Ramirez (chant), Chris Hansen (basse) et Rob Mullen (batterie), le groupe émet dans l’atmosphère un premier EP ʺEuphoric obsessionʺ en 2010. En 2014, c’est un deuxième EP ʺExalted compositionsʺ qui voit le jour, également à compte d’auteur, avant que Gad Gidon ne renouvelle son équipe autour de Brandon Millan (batterie, ex-Arkaik), Josh de la Sol (chant, ex-Nihilitus), Ricky Fregosi (basse), rejoints en 2017 par le guitariste Christian Mansfield (guitare), pour le premier album ʺAshvatthaʺ, sorti la même année, toujours de manière indépendante.
Les nouveaux musiciens du groupe arrivent tous de combos death metal technique locaux. Car on est ici entre technocrates. Gad Gidon n’embauche pas le premier venu, il coopte des virtuoses, des gens qui ont toujours deux ou trois cordes de plus que la normale sur leurs instruments, dont les manches sont aussi plus longs et les batteries équipées de plus de fûts et de cymbales qu’à l’ordinaire. Le but est de jouer serré, compact et rapide.
Si ce premier album se permettait une dizaine de morceaux exécutés en quarante minutes, ʺMokshaʺ, le deuxième album, propose le même nombre de titres mais réduit la durée de dix minutes, ce qui rend les chansons particulièrement denses. C’est le label Transcending Obscurity qui déniche The Last Of Lucy et leur offre la possibilité de se faire connaître à l’international. Si vous avez des enfants en bas âge, évitez de leur montrer la pochette de ce disque, dont le réalisme monstrueux est susceptible de flanquer la frousse, pour peu qu’on s’imagine que le genre de créature représentée ici pourrait exister dans la réalité. Mais si vous avez une grand-mère complètement sourde, vous pouvez lui faire écouter ʺMokshaʺ, ça n’aura aucune influence sur l’état de ses tympans. Le mieux est quand même de se réserver cet album entre esthètes du son extrême, qui pourront profiter de solos de guitare joués plus vite que le son, une rythmique colossale qui fonce également à toutes vitesses et qui dézingue tout sur son passage, et un chant d’ogre ayant marché sur un clou rouillé.
Mais si tout semble emprunter la voie de la précipitation sur cet album, il faut quand même remarquer que les compositions sont d’une précision d’horlogerie suisse. Quand le technocrate s’attaque au rock, cela donne du rock progressif mais quand le technocrate verse dans le métal extrême, on obtient du death metal technique, d’une précision au quart de ton près et aux compositions d’une extrême finesse, surtout quand les hommes de The Last Of Lucy s’accordent quelques pauses un peu plus atmosphériques, où on s’aperçoit qu’ils pourraient aussi animer un orchestre de jazz rock afro-cubain.
Bref, cet album ʺMokshaʺ est époustouflant à la fois de technique et de brutalité. Sa brièveté est en fait un atout car s’il fallait déchiffrer pendant une heure toutes les subtilités de la partition, jouée qui plus à la vitesse de l’éclair, nos pauvres neurones auraient fondu depuis longtemps.
Le groupe :
Gad Gidon (guitare et basse)
Brandon Millan (batterie)
Josh de la Sol (chant)
Christian Mansfield (guitare rythmique)
L’album :
ʺMokshaʺ (02:14)
ʺAgniʺ (03:22)
ʺAforethoughtʺ (02:43)
ʺEgo Deathʺ (02:48)
ʺRitual of the Abraxasʺ (04:04)
ʺParasomniaʺ (02:53)
ʺTemple of Ratiʺ (03:03)
ʺGanga’s Cenoteʺ (03:07)
ʺCovenantʺ (02:55)
ʺThe Demiurgeʺ (03:42)
https://thelastoflucyband.bandcamp.com/
https://www.facebook.com/thelastoflucyofficial
Pays: US
Transcending Obscurity
Sortie: 2022/02/11