ETERNAL CHAMPION – Ravening iron
Le Texas est plutôt connu pour ses zones désertiques et ses puits de pétrole alimentant la fortune de milliardaires peu scrupuleux mais on imaginait mal cet État américain être également une Terre du Milieu où des preux chevaliers viendraient taillader des dragons à coups d’épée magique pour délivrer des princesses de royaumes souterrains. C’est pourtant cet univers sorti directement de l’imagination de J.R.R. Tolkien ou de Robert E. Howard, l’auteur de Conan le Cimmérien, que Jason Tarpey évoque avec force dans son groupe Eternal Champion. En termes de heavy metal, il n’y a pas plus classique et radical qu’Eternal Champion : vous prenez des plaques de tôle abandonnées par les engins blindés de Judas Priest, Saxon, Dio, Hammerfall, Manowar ou Armored Saint, vous les vissez entre elles et vous obtenez Eternal Champion. Autre signe du fanatisme de ce groupe envers l’univers heroic fantasy, le nom du groupe vient des romans de Michael Moorcock, qui en a fait un héros réincarné dans le multiverse et dont les actions appartiennent à un combat plus large entre les forces de la loi et du chaos.
Eternal Champion est donc principalement la chose de Jason Tarpey, un chanteur qui monte ce groupe en 2012 et qui met un certain temps à trouver une équipe stable. Si Jason Tarpey peut compter dès 2013 sur la présence du guitariste Blake Ibanez (des thrashers de Power Trip), il met la main en 2015 sur un trio qui évolue dans Sumerlands, War Hungry et Stone Dagger : Nujon Powers (guitare), Brad Raub (basse) et Arthur Rizk (batterie, qui aidait également Power Trip en concert). Eternal Champion édite son premier album ʺThe armor of ireʺ en 2016 et vient ainsi faire valoir ses droits au titre de prétendant à la couronne de fer réservée aux grands princes du heavy metal. Ce premier album rejoint sans aucune préoccupation innovante le canal historique du métal traditionnel, celui des donjons et des dragons.
Avec le deuxième album qui nous intéresse ici, Eternal Champion a davantage fourbi ses armes, remis ses glaives sous la forge pour en aiguiser la lame, mis une double couche d’armure et sorti la cavalerie lourde pour partir à l’assaut d’un métal fier-à-bras qui fait du bien par sa fraîcheur et son absence totale de complexes. Des complexes, effectivement, Eternal Champion n’en a pas, on le voit dès les pochettes de ses albums, dont le deuxième nous balance dans les mirettes un dessin d’un érotisme torride, un truc à faire bander un curé moribond.
Alléchés par cette pochette racoleuse, on va donc prendre un billet de train pour la forêt de Brocéliande, mettre une belle nappe sur la table ronde et y convoquer les chevaliers, et surtout on va tourner les boutons de la chaîne hi-fi à fond pour faire tonner de fières et arrogantes chansons comme ʺA face in the glareʺ, ʺRavening ironʺ ou ʺSkullseekerʺ, qui démarrent l’album comme du pur Judas Priest étant entré en collision avec Manowar. La voix de Jason Tarpey résonne comme un Ozzy Osbourne perché en haut d’une montagne, sans exagération particulière et agressivité irritante. Les guitares forgent du riff guerrier et la rythmique fait défiler un tempo martial et rugueux. Le groupe sait aussi faire des variations dans son style, afin d’introduire davantage de mélodie et de faire évoluer le chant. Dans ce sens, ʺWar at the edge of the endʺ ou ʺCoward’s keepʺ sont séduisants par leurs différents aspects, passant de la rapidité à une lenteur plus affirmée, afin de mettre en valeur les solos de guitare ou le chant riche de Jason Tarpey. Après un ʺWorms of the Earthʺ conquérant, ʺThe goldbladeʺ vient trancher les ambiances musclées du disque avec un intermède flottant aux synthétiseurs, ce qui donne à l’album une allure d’épopée plutôt qu’une juxtaposition de morceaux martiaux. On pourra alors être achevé par un ʺBanners of Arhaiʺ bien expressif qui pose une dernière chape de plomb sur le disque. Mais cette chape de plomb est livrée dans un drap de velours, quand on voit la subtilité métallique qu’Eternal champion est capable de glisser dans ses compositions.
On n’est peut-être pas dans la finesse la plus totale avec Eternal Champion mais il est clair que ce groupe a une maîtrise irréprochable du heavy metal pur et dur, celui qui fleurissait encore sans la concurrence de sous-genres multiples de 1978 à 1982.
Le groupe :
Jason Tarpey (chant)
Blake Ibanez (guitare)
Nujon Powers (guitare)
Brad Raub (basse)
Arthur Rizk (batterie)
L’album :
ʺA Face in the Glareʺ (04:59)
ʺRavening Ironʺ (05:01)
ʺSkullseekerʺ (04:13)
ʺWar at the Edge of the Endʺ (04:45)
ʺCoward’s Keepʺ (05:54)
ʺWorms of the Earthʺ (04:29)
ʺThe Godbladeʺ (02:17)
ʺBanners of Arhaiʺ (05:41)
https://eternalchampion.bandcamp.com/album/ravening-iron
https://www.facebook.com/eternalchampion
Pays: US
No Remorse Records
Sortie: 2020/11/20