EREMIT – Carrier of weight
Je me demande à quoi la jeunesse allemande peut bien passer son temps à Osnabrück, en Basse-Saxe. En tous cas, il y en a qui ont résolument choisi la voie du métal obscur et extrême puisque cette riante cité qui vit naître l’écrivain Erich-Maria Remarque est également le lieu où près de 80 groupes de death, black, sludge et autres doom metal ont été officiellement répertoriés par le site de référence Encyclopedia Metallum. Peut-être qu’il ne fait pas beau, à Osnabrück…
Toujours est-il que pour l’amateur de métal, cette ville est une mine intéressante. Un des derniers groupes à avoir germé dans la région s’appelle Eremit. C’est un duo composé de Marco Baecker (batterie) et Moritz Fabia (guitare et chant). Ce dernier a également traîné chez Dragged, formation sludge/doom metal ayant commis un premier album ʺWe summonʺ en 2016, et Separatist, qui s’est justement séparé après une démo en 2013.
Eremit a consacré son premier album à la composition de seulement trois morceaux, mais dont les durées sont phénoménales. ʺCarrier of weightʺ (un nom bien porté) commence effectivement avec les 23 minutes de ʺDry landʺ, titre épais et gluant scandé par un leitmotiv rythmique entêtant et qui doit sans doute battre des records de final qui n’en finit pas. Les deux lascars d’Eremit achèvent en effet ce morceau avec une annonce qui fait comprendre que le morceau va se terminer mais la répétition du thème prend tellement de temps que l’on a l’impression que ça ne va jamais se finir. C’est ça le sludge, c’est le désespoir de ne jamais voir la fin.
ʺFroth is beckoningʺ vous en remet une petite couche de onze minutes, cette fois avec une rythmique plus enlevée mais enfouissant toujours l’auditeur sous des kilotonnes de riffs pesants et pachydermiques. La rythmique martiale donne envie de s’adonner à des danses tribales tout en cherchant à sacrifier quelques jeunes vierges glanées à la sortie des couvents. Puis tout se calme d’un coup et c’est une vague de somnolence malsaine qui s’empare de nous, nous poussant à nous enterrer dans les profondeurs de la terre, ne serait-ce que pour échapper aux hurlements batraciens et grognons du chanteur.
Mais tout cela n’est rien à côté du gigantesque ʺCocoon of soulʺ, 33 minutes de hantise qui nous font voyager dans des paysages variés. On démarre dans la finesse gracieuse d’une guitare isolée, juste accompagnée de quelques coups de cymbales. Puis les choses montent tout doucement en puissance au moment où la batterie s’investit un peu plus, toujours en tempo lent. Et finalement, comme il fallait s’y attendre, le ciel craque et déverse sur nos têtes l’incommensurable épaisseur d’un sludge metal ralenti et désespéré. Le chanteur coasse des hurlements incompréhensibles mais on devine qui ne parle pas de cueillette de champignons ou de collection de timbres représentant des brins de muguet. Puis les choses s’accélèrent encore un tantinet avec une agressivité affirmée du chant. Mais il est bien connu qu’une course d’hippopotame ne dure jamais bien longtemps, ce qui aboutit logiquement à un nouveau ralentissement du rythme, avec toujours ce petit je-ne-sais-quoi de touche psychédélique qui rend ce morceau tout à fait intéressant. Je ne vais pas vous raconter la fin mais sachez qu’Eremit, dont le premier album sort sur le label indien Transcending Obscurity, est hautement recommandable pour les amateurs de sludge et doom metal dépressif.
Pays: DE
Transcending Obscurity
Sortie: 2019/02/25