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Nuits du Bota 2021: Born Bad forever

La première soirée thématique des Nuits du Bota a mis à l’honneur le très respecté label Parisien Born Bad Records. Sur la scène de l’Orangerie, trois de ses pointures : Vox Low, Le Villejuif Underground et Bryan’s Magic Tears.

On avait découvert ces derniers dans un bar de Forest un dimanche soir de mars 2019. Une soirée surréaliste à deux égards : la barmaid ignorait qu’un concert allait avoir lieu dans son établissement et le groupe a appris en arrivant sur place qu’un set acoustique était prévu au programme. Heureusement, le lendemain, les choses allaient reprendre un cours normal au Chaff, lors d’une des plus mémorables prestations que le regretté café de la place du Jeu de Balle ait connu.

À l’époque, leur excellentissime deuxième album, « 4 AM », venait de sortir et allait devenir un de nos préférés de l’année. C’est d’ailleurs avec sa plage d’intro (« Ghetto Blaster ») que les festivités se sont mises en place ce soir. Un titre qui n’a rien perdu de sa fraîcheur derrière son mur de guitares et ses influences shoegaze.

Voici quelques semaines, ils ont publié « Sad Toys », un premier extrait prometteur de « Vaccuum Sealed », leur nouvelle plaque prévue pour le 15 octobre. Croyez-le ou non, ce titre instantanément mémorisable situé quelque part entre les Stone Roses et les Happy Mondays, ne sera pas le plus percutant des nouvelles compositions dévoilées durant leur set. Notre coup de cœur ira même à un titre kilométrique, nerveux et hypnotique à souhait, soutenu par des flashes stroboscopiques.

La voix de la bassiste Lauriane Petit s’affirme plus régulièrement que par le passé alors que celle de Benjamin Dupont ne se retrouve plus systématiquement noyée au milieu des instruments. Cela ne l’empêchera toutefois pas de triturer sa guitare et de casser une corde au milieu de « Slamino Days ». Business as usual et une nouvelle prestation trois étoiles…

Paru le même jour que « 4 AM », le deuxième album signé Le Villejuif Underground (« When Will The Flies In Deauville Drop? »), contenait notamment « Wuhan Girl ». Ou comment mentionner une ville jusqu’alors inconnue au bataillon qui sera sur toutes les lèvres douze mois plus tard. Depuis, Nathan Roche a poursuivi sa carrière solo en publiant successivement un EP et un LP. Véritable troubadour des temps modernes qui, quand cela lui chante, se balade avec sa guitare, dort sur un canapé et vit de relations sociales, il a parallèlement joué seul sur scène en acoustique (le Monty à Genappe), avec des bandes (le DOK à Gand) et en groupe expérimental (Le Micro Festival à Liège).

L’Australien d’origine désormais basé dans l’Hexagone a donc retrouvé son groupe pour une mini tournée belge de quatre dates. Pur collectif à géométrie variable, on y retrouve notamment Guillaume Rottier (Rendez Vous) et Paul Ramon, le batteur de… Bryan’s Magic Tears qui entamait donc son deuxième concert d’affilée. Et en support dans la salle, Nikolaj Boursniev (Pleasure Principle), le Lillois qui était déjà venu au secours de Benjamin Dupont lors de son accident de guitare et qui s’est retrouvé à un moment sur scène, tambourin à la main. Pour l’anecdote, le lendemain à De Roes à Gand, il accompagnera admirablement le groupe sur scène à la guitare, donnant à la prestation un cachet encore plus nerveux.

Mais ce soir, c’est à l’Orangerie que tout ce petit monde se produit, et il ne faudra pas plus de deux minutes à l’ami Nathan pour se retrouver couché sur scène au son de l’efficace « John Forbes » (un peu plus tard, il rampera littéralement au beau milieu du public). Hyper expressif tant dans ses intonations que dans ses gestes, il transformera ensuite « Sorry J.C. » en véritable passeport de la langue des signes.

Sur scène, c’est le foutoir mais cela tient la route et cela va même s’emballer sur une version complètement réarrangée de « Rock ‘N’ Roll 80’s Violence » et une autre franchement disco speedée de « Le Villejuif Underground ». Ceci dit, le sommet sera atteint lors du final « Les Huîtres À Cancale », un des deux titres poppy groovants issus d’un 45 tours isolé publié l’an dernier, sur lequel l’accent de Nathan dévoile tout son charme (« Vous aimez les huîtres à Cancale mais pas les autres animaux… »).

Les deux têtes pensantes de Vox Low, Jean-Christophe Couder et Benoît Raymond, sont loin d’être des débutants. Ils étaient ainsi déjà actifs au début des années 2000 au sein du projet Think Twice (non, il ne s’agit pas d’un hommage à Céline Dion…) et ont même publié 2 EP’s sur F Com, le label de Laurent Garnier. Le groupe s’est finalement séparé et les deux compères ont poursuivi leur route aux influences multiples, tant qu’elles tournent autour de l’électro et du rock au sens large du terme. Ils ont remixé d’autres artistes, publié une panoplie de singles et de maxis sur divers labels avant d’atterrir chez Born Bad pour la sortie de leur premier album en 2018.

Ils vont dès lors ponctuer la soirée en injectant des beats aux lignes de basse et aux riffs de guitare, transformant du même coup l’Orangerie en piste de danse. Franchement dark, leurs compositions d’une redoutable efficacité semblent tout droit sorties du côté obscur des 80’s. Elles prennent toutefois un cachet singulier après avoir intégré le côté motorique du krautrock et les nappes chères au dancefloor, le tout scellé d’une voix sobre et désintéressée. Notons que de vrais instruments (basse, guitare, batterie) côtoient les consoles et autres machines.

On pense ainsi à du Rendez Vous plus lumineux ou à du Goose sous Prozac mais c’est surtout l’écurie DFA de James Murphy qui saute aux oreilles, LCD Soundsystem et The Rapture en tête. La tension et l’urgence contribuent quant à elles à maintenir une atmosphère délicieusement glaciale qui fonctionne parfaitement, comme le démontre notamment « Now, We’re Ready To Spend », leur morceau de bravoure. Ou comment démontrer que les membres du comité de direction de Born Bad n’hésitent pas à sortir des chemins balisés. De bon augure pour l’avenir…

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