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L’ouragan Shame

Coincée entre celles de Cologne et d’Amsterdam, la date bruxelloise de Shame a enfin vu le groupe repasser par l’AB. Au programme de la soirée, la promotion de « Food For Worms », un troisième album publié tout récemment qui a la particularité de diviser tant les fans que la critique. Dès lors, rien de tel que le live pour trancher les avis…

Pas sûr d’ailleurs que le choix de la première partie aidera les uns et les autres à se mettre d’accord. Malgré un nom très post-punk / emo au demeurant, le duo They Hate Change n’a en effet absolument rien à voir avec les Londoniens, mis à part peut-être la fougue et un sens tout relatif du compromis. Ce duo hip-hop old school originaire de Floride virevolte dans tous les sens devant une énorme console qui balance des beats pendant qu’un double flow soutenu laisse peu de place à la respiration. Dizzee Rascal meets Run The Jewels in clubland. L’ouverture d’esprit de certains a été mise à mal…

Après « Songs Of Praise », un impeccable premier album paru début 2018 et un agenda démentiel qui les a ensuite vus passer en quelques mois par la Rotonde, le Dour Festival et ici-même, l’étoile de Shame a quelque peu pâli. Soyons honnêtes en affirmant que son successeur arrivé pile trois ans plus tard, « Drunk Tank Pink », n’a pas répondu à nos attentes, à l’instar de leur passage au Trix l’an dernier. Une étincelle que l’écoute initiale de « Food For Worms », troisième essai sorti chez « Dead Oceans » fin février, était sur le point d’éteindre.

Jusqu’à ce que l’on s’acharne pour devenir notamment complètement accro à « Fingers Of Steel », titre d’intro à la tension palpable qui sera la norme tout au long de la soirée. Ou à cette guitare entêtante d’« Alibis » bardée de flashes stroboscopiques joué dans la foulée. Ceci dit, c’est avec « Alphabet » que les choses sérieuses débuteront vraiment, générant des mouvements de foule spontanés vers l’avant pour une première salve de pogos bien sentis.

À ce moment, Charlie Steen, désormais généreusement chevelu, avait déjà laissé tomber la veste et déboutonné sa chemise jusqu’au nombril. Il ne lui faudra pas plus d’un autre morceau (le sauvage « Concrete » pour ne pas le nommer) avant de se retrouver torse nu, le pantalon soutenu par de simples bretelles. Rassurons les âmes sensibles, son strip-tease n’ira pas plus loin… En revanche, il prendra de réguliers bains de foule, soutenus par des spectateurs autant en sueur que lui.

Le groupe officie devant une immense banderole à l’effigie de la pochette du nouvel album, sorte de tableau inspiré de Pierrot le Clown que l’on pourrait imaginer orner le papier-peint d’une chambre de nourrisson. En tout cas avant d’observer le regard plutôt démoniaque du personnage mis en avant. Un terme que l’on pourrait associer à l’insupportable Josh Finerty, le bassiste hyperactif qui arpente sans répit la scène lorsqu’il ne se prend pas pour un kangourou bien essoufflé au moment d’assurer la seconde voix.

Pas de comptines au programme donc, mais des passages faussement plus calmes (les récents « Burning By Design », « Adderall ») qui encourageront certains à se ravitailler au bar. À condition toutefois de ne pas traîner pour vider son verre au risque de voir son contenu valser au contact de ses voisins une fois l’intensité revenue (un « Tasteless » complètement dingue ou un fou-fou « 6/1 » en inonderont ainsi plus d’un).

Parmi les nouveaux titres, si la teneur de « Six-Pack » semble un rien trop classic rock à nos yeux malgré un final bien enlevé, l’excellent « The Fall Of Paul » risque quant à lui de se hisser rapidement à la hauteur des classiques qui émailleront la fin de la prestation. On pense bien entendu à l’efficace « One Rizla » (qui illustrera quelques tentatives d’invasion de scène) et au lumineux crescendo d’« Angie ». Mais le saccadé « Snow Day » entre les deux aura lui aussi quelques arguments à faire valoir. Sans parler de « Born In Luton » dont le final particulièrement bordélique verra le chanteur se retrouver une guitare entre les mains.

Après de longues minutes d’hésitation et alors que les lumières étaient déjà rallumées dans la salle, le groupe reviendra sans crier gare pour un inattendu « Gold Hole ». Un furieux bonus qui fera passer la prestation dans une catégorie supérieure et nous réconciliera avec un groupe dont la réelle plus-value passe clairement par la scène.

SET-LIST
FINGERS OF STEEL
ALIBIS
ALPHABET
CONCRETE
THE LICK
SIX-PACK
TASTELESS
BURNING BY DESIGN
6/1
BORN IN LUTON
THE FALL OF PAUL
ADDERALL
ORCHID
WATER IN THE WELL
ONE RIZLA
SNOW DAY
ANGIE

GOLD HOLE

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