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King of my Cassels

L’avantage d’un complexe comme celui de l’AB, c’est que des affiches pour le moins disparates peuvent cohabiter sans aucun problème. Par exemple, ce mardi, le reggae de Steel Pulse enfumait la grande salle pendant que le Club se faisait dégommer par la fougue de Pure Adult et de Cassels.

Curieusement, ce sont les seconds nommés qui ont entamé les festivités alors que leur passage sold out au Witloof Bar du Botanique en avril 2023 leur aurait plutôt garanti un statut de tête d’affiche. Un choix dicté par une alternance entre les forces en présence auquel il n’est pas question de déroger. Une rigidité finalement néfaste car bon nombre de spectateurs ont quitté les lieux après le set des frangins Londoniens dont le deuxième album, « Tracked In Mud », est sorti chez Human Worth début mars.

Entamé par le glacial « Nine Circles », sa plage d’intro indiquera instantanément la direction brute et sans concession qu’ils s’apprêtaient à imposer les quarante-cinq minutes suivantes. D’autant que le rugueux instrumental « …And Descends » le prolongera avantageusement, soutenu par d’aveuglants flashes stroboscopiques. Ceux qui étaient au Bota se rappellent sans doute leur positionnement, délibérément coincés entre les pilasses au fond de la scène du Witloof Bar ancienne configuration. Timidité ou foutage de gueule ? Nul ne le sait vraiment mais ce soir, ils se retrouvent sous le feu des projecteurs.

Le regard malicieux du leader guitariste Jim Beck adoucira quelque peu sa hargne, au même titre que ses interventions trilingues plutôt appliquées (et compréhensibles). Tout le contraire de Loz dont l’accent à couper au couteau en surprendra plus d’un. Un détail puisque c’est en pleine action que le duo se montre le plus convaincant et que la tension soutenue prend tout son sens. Cela dit, derrière l’urgence de « Formaldehyde Time » se cachent un groove et des mélodies insidieuses essentielles à sa structure. Une structure qui se voit malmenée sur l’imprévisible et sinueux mais tout aussi excellent « Indigene » ou le troublant « Nature Hates A Vacuum ».

Si les rares incursions dans l’album précédent, le très post-punk « Gut Feeling » de 2022, mesurent le chemin parcouru et l’évolution exponentielle, force est de constater que « Pete’s Vile Colleague » et « Charlie Goes Skiing » restent des bombes à retardement. On ose à peine imaginer ce qu’une association (fictive car désormais impossible) avec un gaillard comme Steve Albini aurait pu donner.

Inconnus ou presque au bataillon indie par ici, les New Yorkais de Pure Adult bénéficient toutefois d’une certaine réputation du côté de leur Brooklyn natal mais pas que. Joe Talbot d’Idles et Oliver Ackerman d’A Place To Bury Strangers sont fans, une évidence à l’écoute du titre d’intro à la fois frappadingue, sinistre et imprévisible. Ils ont publié l’an dernier chez FatCat leur premier album (curieusement baptisé « II ») et célèbrent leur baptême du feu bruxellois.

Emmené par le charismatique et intenable Jeremy Snyder au look franchement seventies par son costume en velours et sa petite moustache, le groupe compte en son sein une deuxième personnalité essentielle. Bianca Abarca, plus discrète que son camarade lorsqu’elle bidouille derrière ses claviers, devient tout aussi insaisissable lorsqu’elle attrape un micro et déblatère des rimes incendiaires qui la rapproche par exemple d’une Phoebe Lunny (Lambrini Girls), l’excentricité en moins.

On l’a dit, une partie des spectateurs a préféré rentrer chez soi sans laisser une chance à Pure Adult et mal leur en a pris. Car en plus des deux personnages précités virevoltant dans tous les sens, le solide backing band a du répondant, entre un guitariste au look de hooligan, un bassiste à la coiffure afro et un batteur baraqué à qui on ne reprochera certainement pas la puissance et la spontanéité. En revanche, des parties assez confuses et déstructurées tendent à brouiller les pistes via des compositions crasseuses et décousues auxquelles des influences metal et hip-hop apportent une diversité par moments malsaine. Une sorte d’ouragan au surprenant final abrupt, à l’image d’un set explosif et inattendu.

Organisation : AB

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