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J. Bernardt, Contigo siempre

Balthazar en hiatus indéterminé, ses membres se concentrent désormais sur leurs projets respectifs et sortent peu à peu du bois. Après Simon Casier (Zimmerman) en février dernier, c’est au tour de Jinte Deprez aka J. Bernardt de publier un nouvel album. Et c’est à l’Orangerie du Botanique qu’il a choisi de le présenter en primeur.

Mais avant, place au déjanté Adriaen Van de Velde, dont le nom de scène (Pomrad) ne constitue pas la face la plus étrange de l’énigme. Musicien aguerri, il a fait partie du précédent line-up de J. Bernardt mais se lâche complètement lorsqu’il se retrouve seul sur scène entre un clavier et une tripotée de machines. Le ridicule ne tuant pas, il s’amuse même avec un keytar rouge flashy en se prenant (vocalement) pour Prince ou Daft Punk.

S’il puisse essentiellement ses insaisissables influences dans la pop synthétique des années 80, l’Europop du début des 90’s et la French Touch revisitée ne sont pas loin non plus. On pourrait encore citer le revival disco à la Scissor Sisters (cette voix de fausset) ou la vision énergique de Compact Disk Dummies. La seule constante réside dans des arrangements délibérément cheap, entre beats vintage et bruitages désuets. À l’image de ses déhanchements, finalement. Mais malgré tout, le gaillard se veut attachant, d’autant qu’il se produit avec un cœur grand comme ça…

« Running Days », le premier album de J. Bernardt, est sorti en 2017 à l’occasion d’un break prolongé de Balthazar. Le groupe a ensuite repris son impressionnant parcours en publiant « Fever » et « Sand » tout en tournant à travers le monde. Jusqu’à cet ultime baroud d’honneur bourré d’émotion en août dernier aux Lokerse Feesten (même si dans les faits leur ultime prestation se tiendra la semaine suivante au Pukkelpop en remplaçant au pied levé Florence + The Machine).

Place donc à la vie post-Balthazar et à « Contigo », deuxième livraison de Jinte Deprez sous son pseudo solo. Un album au tempérament sensiblement différent du précédent puisqu’il a été composé à la suite d’une rupture sentimentale. Les envolées guillerettes ont donc fait place à une certaine sobriété caractérisée par une orchestration léchée dont il est l’auteur (il a une formation de violoniste classique) mais aussi par l’intimité des textes baignant dans le sang d’un cœur brisé.

Une approche mélancolique mise en valeur dès « Rio », l’instrumental en intro de la plaque sur lequel les musiciens prendront possession de la scène avant d’entamer un « Don’t Get Me Wrong » au groove affirmé. Dans la foulée, le tout aussi enjoué « Taxi » démontrera combien l’ami Jinte se sent comme un poisson dans l’eau face au public, arpentant la scène sa guitare dans le dos en se mouvant langoureusement. Difficile de croire qu’il sort d’une période affective compliquée.

Cela s’explique pourtant par le fait qu’il a abordé le sujet en l’analysant sous toutes ses coutures. Il en a en tout cas décortiqué les différentes phases et ceux qui ont traversé ces épreuves en saisiront parfaitement les subtilités. Entre désespoir (le crooner « Contigo »), nostalgie (l’irrésistible « Matter Of Time ») et euphorie (le poppy « I’m The Ghost You Forgot »), le chemin a été parsemé d’embûches. On retiendra également le tristounet « Left Bathroom Sink » à la patiente construction jazzy qui en bouleversera plus d’un (« I need to get away from you »).

Il est accompagné sur scène par de fidèles collaborateurs, parmi lesquels le batteur Klaas De Somer est le seul à avoir participé aux sessions de l’album. Le claviériste Jerome Pringiers (Oproer) et le bassiste Victor Defoort (Roméo Elvis, Mooneye) apportent quant à eux leur pierre à l’édifice en assurant notamment de somptueuses harmonies vocales essentielles à l’équilibre de plusieurs titres.

Judicieusement disséminés dans la set-list, les extraits du premier album offriront une respiration à laquelle il sera compliqué de résister. Sans guitare mais armé d’un drumstick pour lancer l’orchestration à partir d’une sorte de pad à sa disposition, les sensuels « The Other Man » et « Calm Down » renverront presqu’instantanément à son groupe d’origine. En revanche, un « Running Days » particulièrement prenant et un « Wicked Days » bourré de cuivres préenregistrés à l’addictif final electro-hypnotique affoleront l’Orangerie d’un claquement de doigts.

On s’attendait d’ailleurs à ce que ce titre clôture le set principal mais il n’en sera rien, l’urgence et la tension caractérisant « Mayday Call » en mode noisy stroboscopique parvenant à monter encore le curseur d’un cran. À tel point que le patiemment construit « Free » et ses atmosphères cinématographiques à la western spaghetti tarderont à mettre un happy end à l’histoire (« Are we lonely or are we finally free »).

Jinte remontera d’abord seul sur scène pour un troublant titre en solitaire, « Our Love Was Easy », qu’un type comme Loverman, par exemple, s’approprierait volontiers. Dommage que cette satanée lumière rouge (remember Timber Timbre ?) se soit de nouveau invitée dans la pénombre. Ses musiciens le rejoindront ensuite pour le seul nouveau titre non encore interprété ce soir, « Last Waltz », dans une version polyphonique pleine de spleen et de riffs invitant aux grands espaces. Tout comme pour The Bony King Of Nowhere voici quelques années, les ruptures ont parfois du bon dans la vie d’un artiste…

SET-LIST
RIO
DON’T GET ME WRONG
TAXI
CONTIGO
I’M THE GHOST YOU FORGOT
THE OTHER MAN
CALM DOWN
MATTER OF TIME
LEFT BATHROOM SINK
RUNNING DAYS
WICKED STREETS
MAYDAY CALL
FREE

OUR LOVE WAS EASY
LAST WALTZ

Organisation : Botanique

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