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Hail To The Bony King Of Nowhere

Bram Vanparys a pris son temps mais le nouveau The Bony King Of Nowhere est finalement arrivé le mois dernier. Et quel retour ! « Everybody Knows » élargit drastiquement les horizons d’un artiste épanoui comme sa prestation à l’AB s’apprêtait à le démontrer.

Lorsque son ami Hendrik Lasure a débarqué sur scène pour assurer la première partie, on a d’abord pensé qu’il s’agissait de son sosie, quelques années en moins. Même coiffure, même démarche, mêmes type d’accords mélancoliques à la guitare. Mais la comparaison s’arrête là car le gaillard chante dans la langue de Vondel d’une surprenante voix androgyne et modulable qui donne littéralement vie à des compositions délicates.

Mais là où il touche son auditoire attentif et captivé en plein cœur, c’est lorsqu’il les interprète magnifiquement au piano, leur conférant par moments une atmosphère jazzy. Ou comment transformer l’endroit en cabaret feutré tout en gardant cet air malicieux, comme lorsqu’il s’accompagne d’un métronome. « Het Wiel », publié chez Unday en 2022, pourrait bien ouvrir votre esprit à des contrées insoupçonnées…

Pas simple de succéder à un album aussi parfait que « Silent Days », une des pièces maîtresses de la discographie de The Bony King Of Nowhere. Sorti en 2018, il puisait sa richesse dans une rupture sentimentale, le rendant sincère et désarmant sans se montrer plombant pour autant. Avant de lui composer un successeur, Bram Van Parys a fêté le dixième anniversaire de « Alas My Love » dans cette même salle avant d’en sortir une édition Deluxe en vinyle comprenant un album complet d’enregistrements inédits. Il a entre-temps produit le EP « Waiting Room » de Kids With Buns ainsi que « Sense & Nonsense », l’imminent premier album de Ivy Falls.

Dévoilé début février, « Everybody Knows » se distingue par un son plus ample, fruit d’un travail collégial qui a notamment vu le précité Hendrik Lasure prendre les arrangements de cordes à son compte et le fidèle Koen Gisen endosser la veste de coproducteur aux côtés d’un Bram Vanparys métamorphosé. On ne se souvient en effet pas l’avoir déjà vu se concentrer uniquement sur les vocaux sans sa guitare fétiche. C’est pourtant de cette manière qu’il a entamé sa prestation par un « Working Harder » certes un peu maladroit (il ne sait pas toujours que faire de ses mains) mais musicalement au top grâce à des musiciens hors pair qui enverront ensuite l’imparable « Are You Still Alive » dans une autre dimension.

Parmi ceux-ci, Douglas Firs, le guitariste aux multiples fonctions (dont celle d’assurer çà et là les chœurs dans un mégaphone) et le jovial batteur massif Simon Segers (Sylvie Kreusch, Stadt…) apportent indéniablement un plus à des compositions taillées pour la scène. De l’autre côté, le bassiste Jasper Hautekiet et le claviériste Thijs Troch (Nordmann, Hypochristmutreefuzz…) complètent une sorte de supergroupe dont la complémentarité et la richesse orchestrale ne sont plus à démontrer. Cette version intelligemment construite de « Going Out » basée sur des nappes sinistres et une entêtante lapsteel en étant un exemple, au même titre que les contours harmonieux de « Silent Days ».

« Everybody Knows » s’éloigne de plus en plus des racines americana des débuts, une démarche déjà amorcée sur « Silent Days » qui officiait plutôt dans le registre de Kurt Vile ou de The War On Drugs. Cette fois, c’est l’univers de Radiohead qui saute aux oreilles. Outre les intonations à la Thom Yorke (que Bram vénère, nous avouera-t-il après le show), les bidouillages électroniques discrets installent une atmosphère que les natifs d’Oxford ont peu à peu imposé comme leur marque de fabrique. On pense notamment aux excellents « Erase » et « Get One Free », les deux autres titres pendant lesquels il ne s’encombre pas d’une guitare. La timidité en moins, il ira même jusqu’à s’aventurer sur le tout devant de la scène. Mais pas trop quand même…

Parmi les autres nouveaux titres, on retiendra également un faussement retenu « Almost Invisible » ainsi qu’un « Slow Down » aux passages presque noisy 70’s à la Neil Young. En toute fin de set, c’est « Falling Into Place » qui donnera sa toute-puissance, à peine tempérée par un mélodica sorti de la riche collection d’objets de Douglas Firs. Par ailleurs, la magistrale version solo acoustique de « Eleonore » sera curieusement la seule incursion antérieure à « Silent Days », tournant presque la page sur son passé de troubadour. Tout aussi addictive sera celle, entre rage et passion, de « Like Lovers Do » en final du set principal, qui confirmera la faculté qu’a l’ami Bram de particulièrement bien s’entourer.

Il reviendra sur scène zen et visiblement ému pour des rappels posément entamés par un « Still Around » rêveur à souhait. Peu habitué à voir le public frapper des mains lors d’un concert de Bony King, il se lancera ensuite dans un « Perfect Sense » dont la rythmique carrée, les nappes hantées et les chœurs chaleureux clôtureront les débats en mode frissons dans le dos. Si l’on considère « Everybody Knows » comme son album de la maturité, celle-ci lui va à ravir…

SET-LIST
WORKING HARDER
ARE YOU STILL ALIVE
EVERY ROAD
ALMOST INVISIBLE
EVERYBODY KNOWS
GOING OUT
ERASE
ELEONORE
ALL IT TAKES
SLOW DOWN
GET ONE FREE
SILENT DAYS
FALLING INTO PLACE
LIKE LOVERS DO

STILL AROUND
PERFECT SENSE

Organisation : AB

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