Nuits du Bota 2018 : After the Iceage…
Ce dimanche 6 mai, la programmation de l’Orangerie aux Nuits du Bota a tapé aussi fort que le généreux soleil inondant les célèbres marches du complexe. Et pour cause, les Danois de Iceage effectuaient leur grand retour, deux jours après la sortie de « Beyondless », leur nouvel album.
Surprenante, hors norme, extrême. Les termes manquent pour caractériser la prestation de The Body, duo originaire de Portland, que l’on aurait davantage imaginé sur la scène du Magasin 4 (où ils ont déjà joué) que celle du Bota. Constitué d’un batteur et d’un guitariste bidouilleur d’un âge mûr, ils prônent un style doom expérimental qui emprunte une voie distordue lorsque ce dernier prend le micro pour y cracher des cris stridents dont la nuance varie au gré des compositions. Aucun mot entre celles-ci mis à part des bandes diffusant ce qui ressemblait à un discours de propagande. Un sacré régime d’entrée de jeu…
Cela fait longtemps que la réputation des Liégeois de It It Anita dépasse largement les frontières de la Principauté. Ils s’apprêtent d’ailleurs à s’envoler pour une tournée au Canada et vont dès lors profiter de cette soirée pour peaufiner les derniers détails de leur show. À ce propos, peu importe la grandeur de la scène, ils sont empaquetés sur un espace réduit et jouent devant les trois lettres blanches que sont leurs initiales. Celles-ci resteront pour une fois bien en place, au contraire du chanteur qui terminera le set dans le public.
Boostés par la rythmique rageuse imposée par le batteur Bryan Hayart (aperçu récemment derrière les fûts de Girls In Hawaii), le quatuor emmené par le passionné Damien Aresta ne va pas se la couler douce. Au contraire, l’environnement noisy à la Sonic Youth amène une tension amplifiée par des hurlements sentis et dangereux pour les tympans. Celle-ci ne se relâche que momentanément lorsqu’ils lèvent le pied et renvoient alors vers du Pavement. Un condensé indé nineties à guitares qui ne sonne revival à aucun moment.
Mis à part un live sorti en 2015, cela fait quatre ans qu’Iceage était au frigo, momentanément remplacé dans le cœur du chanteur Elias Bender Ronnenfelt par son projet parallèle Marching Church. Ils viennent tout juste de sortir leur quatrième album, « Beyondless », et celui-ci risque d’en décontenancer plus d’un. En effet, l’addition de cuivres et de cordes (on retrouve un saxophoniste et un saxophoniste sur scène) envoie le groupe dans une sorte de cabaret post punk par moments très glam, à l’instar de « Hurrah », la plage d’intro qui sera aussi celle du concert de ce soir, petit frère du « We Are The Boyz » de Pulp sur la B.O. de Velvet Goldmine.
S’ils ont quelque peu arrondi les angles, on n’ira pas jusqu’à dire qu’ils ont viré pop malgré un duo avec Sky Ferreira (« Pain Killer ») qui, sur scène, lorgne du côté de Roxy Music au début des années 70, tout comme l’efficace « The Day The Music Dies » et son saxo infernal. On rassure les puristes, leurs compositions restent un chouia compliquées d’accès même si désormais, on cerne davantage où ils veulent en venir (« Plead The Fifth », « Thieves Like Us »). Bien entendu, certains titres nécessitent un certain nombre d’écoutes pour se dévoiler (« Under The Sun », « Beyondless ») mais dans l’ensemble, le théâtral leader, chemise ouverte jusqu’au nombril, joue au parfait chef d’orchestre à défaut de communiquer avec le public.
Les incursions dans leur back catalogue ne seront pas fréquentes, preuve d’une volonté perpétuelle d’évoluer. On pointera tout de même le puissant « On My Fingers », le très carré « The Lord’s Favourite » et un « Ecstacy » toutes guitares en avant. Bémol pour le final trop allongé qui en découragera plus d’un mais tout à fait dans l’esprit d’un groupe indéniablement à part…