Nuits du Bota 2018 : Insecure Men en manque d’âme
Pour leur vingt-cinquième édition, les Nuits du Bota s’offrent quelques exclusivités, à l’instar du tout premier passage belge d’Insecure Men, le nouveau supergroupe indie à suivre. Les Anglais venaient y présenter en force leur album éponyme.
Qui dit Nuits du Bota dit en général pré-première partie et celle de ce soir a été confiée à Lenny Pistol, récente signature du dynamique label Luik Records. Derrière ce pseudo on ne peut plus rock ‘n’ roll se cache pourtant un singer-songwriter à la prose délicate et aux mélodies lo-fi minimalistes prenantes à souhait. Mac DeMarco n’est pas loin mais l’attitude et l’accoutrement du bonhomme, casquette vissée sur le crâne en tête, n’y sont sans doute pas étrangers.
Sur scène, il se fait accompagner par un compère au look très eighties qui bat la mesure au moyen d’une batterie électronique rudimentaire. Mais il passe clairement au second plan tant la guitare et la voix captent l’attention, au même titre que le magnifique micro au design d’après-guerre. Une entrée en matière pour le moins réussie qui sera suivie par la révélation de la soirée.
George Van Den Broek n’a que dix-huit ans mais la voix rauque d’un chanteur d’au moins trois fois son âge. Sous le patronyme Yellow Days, ce natif du Surrey compose des pièces bluesy hors du temps qui ne matchent pas avec sa coiffure rebelle (une queue de cheval blonde qu’orne un crâne à moitié rasé). Accompagné de son groupe parmi lequel se trouve un claviériste essentiel (cet orgue sixties…), il va rester fidèle à son style délicieusement désuet.
Langoureuses et presque sexy, ses compositions font tourner la tête à la gent féminine à un niveau rarement atteint (Marry me… I’ll stop being gay for you !, clamera l’une d’entre elles lors d’un intermède). Il est vrai que ses parties de guitare particulièrement torrides ne laissent pas indifférents et à voir le nombre de spectateurs hurlant ses paroles, il ne devrait plus rester dans l’ombre très longtemps…
De délicatesse, il n’en est pas vraiment question lorsque l’on évoque Fat White Family et leurs projets connexes, à commencer par The Moonlandingz, dont la visite au
Dour Festival l’an dernier s’est terminée dans le chaos. Et pourtant. Le guitariste Saul Adamczewski a mis sur pied un nouveau groupe avec Ben Romans Hopcraft, le chanteur de Childhood. Baptisés Insecure Men, ils ont récemment publié un premier album éponyme chez Fat Possum Records et, bien qu’une bonne partie de la famille Fat White soit impliquée, propose une ligne directrice plus sage, mais toute aussi déjantée.
Pas moins de huit musiciens officient sur scène autour du guitariste à l’incisive manquante et du chanteur bassiste désormais orphelin de sa chevelure hirsute. Parmi ceux-ci, pointons un saxophoniste, un guitariste lap steel et un claviériste bigleux. On en a même compté neuf lorsqu’un type venu de nulle part est venu agiter des maracas pendant un confus « Mekong Glitter ».
Musicalement, on se retrouve dans un environnement sixties légèrement psyché (« Cliff Has Left The Building », « All Women Love Me ») que des effets un peu cheap viennent égayer (« Subaru Knights », « Teenage Toy »). Mais ils se paient également un tube imparable par l’entremise d’« I Don’t Wanna Dance (With My Baby) », un clin d’œil à peine voilé à Whitney Houston qui se mue en véritable obsession un peu plus tard via un décevant « Whitney Houston & I ». Si la bonne humeur et un esprit rock ‘n’ roll modéré règne sur scène (un des musiciens siphonnait notamment une bouteille de vin à même le goulot), il manque un petit quelque chose pour rendre leur set pertinent. Et si c’était l’envie, tout simplement ?