La noirceur nuancée de Beach Fossils au Bota
Qui a dit que la rentrée s’annonçait calme d’un point de vue concerts ? Le Bota a en tout cas fait très fort cette année en multipliant d’emblée les événements incontournables dont l’un des points d’orgue était la venue des New Yorkais de Beach Fossils à la Rotonde ce lundi 18 septembre.
Mais la première partie valait le déplacement également puisque les Bruxellois d’Annabel Lee ne se sont pas fait prier pour décoiffer une salle déjà bien garnie à ce moment de la soirée. Impressionnants voici une dizaine de jours au SMG Music Fest, la petite blonde Audrey Marot et ses boys (un Mountain Bike, un Animal Youth et un Regal) ont haussé le ton et, par la même occasion, le niveau.
Nerveux à souhait, leur set renverra autant à l’énergie des Breeders et de Veruca Salt qu’à la vision indie pop de Blondie ou de Lush. Des titres rafraîchissants comme « Best Good Friends » et « Period Sex » (extraits de leur premier EP, « Wallflowers ») ont tout pour devenir des classiques alors que l’image et l’attitude présentent un équilibre parfait. Autant dire que leur avenir s’annonce radieux. Souhaitons-leur un épilogue moins tragique que dans le poème d’Edgar Allan Poe.
Comme le guitariste à l’accent US affûté et à l’abondante chevelure le fera remarquer, Beach Fossils avaient déjà joué à la Rotonde. C’était dans le cadre des Nuits du Bota en 2013, lors de la sortie de « Clash The Truth ». Depuis, silence radio ou presque. Même si on sait que le leader Dustin Payseur n’est pas le musicien le plus assidu, on avait presqu’abandonné tout espoir d’un jour voir arriver le troisième album du groupe. Pourtant, en juin dernier, « Somersault » a été publié et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a de quoi surprendre.
En effet, il propose une palette bien plus large que les sonorités new wave qui émaillaient leur quotidien jusque-là. On a même droit à des moments plus lo-fi, limite jazzy, qui bénéficieront sur scène d’un accompagnement à la trompette et de nappes synthétiques chaleureuses (« Saint Ivy »).
Ceci dit, leur prestation débutera en force avec l’excellent « Generational Synthetic », titre sombre à la DIIV qui plantera le décor avant qu’une basse entêtante ne jalonne « Shallow ». On a toutefois du mal à garder notre sérieux à la vue de la veste du leader, bardée de publicités qui le font davantage ressembler à un homme sandwich qu’à un rockeur (le logo M&M’s dans le dos, cela ne le fait vraiment pas…). Il échangera ensuite sa guitare contre une basse pour le poppy « This Year », la plage qui ouvre « Somersault » et qui sera le premier nouveau titre interprété ce soir.
Un peu plus tard, les plus softs « Sugar » (avec le guitariste susmentionné qui secouera une licorne enchantée…) et « Be Nothing » nous renverront au début des 90s, en tout cas avant l’explosion sonore qui caractérisera le second nommé. Outre un délire qui verra le claviériste balancer l’intro d’un titre des Happy Mondays (on était lundi…) avant un excellent « Careless », on pensera beaucoup aux Charlatans via la voix de Dustin (« Calyer »), mais aussi à New Order (la basse de « What A Pleasure »). Quant au lancinant final, le bien nommé « Closer Everywhere », il s’agit sans doute du meilleur nouveau morceau du lot, à la fibre shoegaze appuyée.
Lors des rappels pendant lesquels ils vont remercier à peu près tout le monde (sur scène et en dehors), ils se fendront d’un délire au son du générique de Lord Of The Rings et balanceront deux dernières pépites post punk au travers de « Crashed Out » et de « Daydream ». Un bonus plus classique qui ne doit pas éclipser l’évolution prônée sur « Somersault » et défendue lors de l’heure précédente.