Interview de Noora Louhimo du groupe Battle Beast
La vocaliste du groupe finlandais Battle Beast a accordé une interview à Music In Belgium dans le cadre de la sortie du nouvel album «Bringer of Pain».
MIB: Bonjour Noora et toutes mes félicitations pour la sortie du nouvel album.
Noora: Merci, nous sommes très heureux et très fiers de pouvoir présenter notre nouveau CD aux fans et au public en général.
MIB: Après une première écoute, cet album a l’air un peu différent par rapport aux précédents. Quelle a été votre source d’inspiration pour celui-ci? :
Noora: Les sources d’inspiration sont diverses. La vie, tout d’abord. Il y a aussi le fait qu’au lieu de n’avoir qu’un seul compositeur, il y en a maintenant cinq pour cet album. Tout le groupe a participé au processus d’écriture. On peut donc dire que cet album est donc le résultat d’un véritable effort collectif. Chaque membre du groupe y a mis le meilleur de lui-même. Je dois dire que je suis très heureuse du résultat, même si cela n’a pas toujours été facile tous les jours. La préparation de cet album aura été riche en enseignements. Et puis, nous nous sommes quand même aussi bien marrés.
MIB: Sans vouloir être trop indiscret, en quoi la conception de cet album a-t-elle été difficile?
Noora: Quand nous avons commencé à écrire, nous n’avions pas encore entièrement digéré le départ d’Anton (Kabanen). Il a fallu gérer ce départ sur le plan émotionnel. De plus, écrire un album n’est jamais quelque chose de facile parce qu’il faut littéralement donner naissance aux différents morceaux qui vont en faire partie. Dans le heavy métal, on ne se contente pas de faire des copier-coller. Nous donnons tout ce que nous avons pour atteindre le meilleur résultat possible. Certains titres voient le jour assez facilement, comme se fut le cas de «Bringer of Pain». Quand notre nouveau guitariste Joona Björkroth m’a fait écouter la démo, sans aucune ligne de chant ni aucune parole, le morceau m’a immédiatement inspirée. J’ai tout de suite su ce que je voulais en faire et je me suis mise à chanter directement. Le refrain de ce titre m’est venu tout de suite. Le thème de ce morceau (un champ de bataille dans le monde imaginaire appelé « The Glow ») m’est venu en écoutant la démo. D’autres morceaux sont parfois plus difficiles à terminer. Ils faut les adapter, les façonner, les couler dans des moules différents avant de trouver celui qui convient. Bref, il n’y a pas de manière uniforme de créer un morceau, mais une multitude de manières.
MIB: Après une première écoute rapide, j’ai l’impression que tu utilises ta voix d’une manière beaucoup plus diversifiée qu’avant. Est-ce correct ou seulement une impression?
Noora: C’est totalement ça! Cela a toujours été mon but. Je suis heureuse que le groupe me permette d’exploiter diverses facettes de ma voix.
MIB: Tu as en effet une voix très impressionnante. Chaque fois que j’ai eu l’occasion de te voir en concert, je suis carrément sidéré par l’étendue et la puissance de ta voix. Compte tenu de la technique vocale que tu utilises et de la fréquence des concerts, n’y a-t-il pas un risque pour ta voix à terme?
Noora: Je suis une chanteuse professionnelle et c’est vrai que certains registres et modes de chant sont plus éprouvants. Mais je chante comme ça depuis si longtemps que c’est devenu une seconde nature. Je sais que cette technique de chant n’abîme pas mes cordes vocales dont je prends d’ailleurs soin: j’ai arrêté de fumer depuis plus de 3 mois. Depuis que j’ai arrêté de fumer, je me rends compte que l’étendue de ma voix est encore plus grande et que j’ai encore gagné en clarté, ce qui ne m’empêche pas pour autant de continuer à faire les voix plus gutturales.
Je parviens à tout chanter en utilisant moins de pression d’air sur mes cordes vocales, ce qui est une très bonne chose car elles se fatiguent alors moins vite.
MIB: D’après moi, il y a un titre, «Far From Heaven», qui se démarque très fort des autres morceaux de l’album. D’où vous est venue l’inspiration pour ce titre en particulier?
Noora : En fait, c’est Janne (Björkroth) qui a écrit ce titre avec un coauteur. C’est un morceau qui aurait pu figurer sur la bande originale d’un film. Et ce que j’(aime dans ce morceau, c’est qu’il nous permet de surprendre aussi notre public.
MIB: Battle Beast part en tournée en 2017 pour une série de dates assez impressionnante! Dans quels pays allez-vous jouer ?
Noora: Nous commencerons par l’Europe, puis les États-Unis et le Canada. Nous espérons aussi nous produire en Europe de l’Est en fin d’année. Et peut-être au Japon l’année prochaine. Notre année va être bien remplie !
MIB: C’est plutôt une bonne nouvelle quand on sait que beaucoup de groupe ne parviennent pas à vivre de leur musique…
Noora: Il est vrai que le contexte de l’industrie musicale est difficile avec les téléchargements illégaux, etc. Pas facile pour les artistes de s’y retrouver financièrement. Mais le streaming est le mode de consommation moderne et il faut s’y faire. Je pense que les grands labels ont bien compris que ce n’est pas juste un effet de mode mais une évolution durable du marché. Personnellement, j’ai l’impression – mais je n’ai pas de boule de cristal – que l’album traditionnel (avec son artwork, etc.) va disparaître. Mais il ne va pas disparaître entièrement. Il pourrait changer de forme.
MIB: Ne penses-tu pas que l’album CD pourrait faire son come-back comme ce fut le cas pour le vinyle ?
Noora: Je pense que beaucoup de gens achètent des vinyles parce qu’ils aiment voir l’artwork sur la pochette du disque. Ils aiment aussi le côté rétro. Moi aussi j’aime ce côté rétro, même si j’avoue ne pas avoir de platine pour écouter des vinyles. Le vinyle est un objet qui plaît.
MIB : Tu as utilisé le mot rétro. Je trouve qu’il y a aussi un côté rétro à la musique de Battle Beast qui louche très fort vers les années ’80. Êtes-vous en train d’inventer un nouveau sous-genre de la musique métal ?
Noora: Nous sommes issus de la génération heavy métal. En étant devenus musiciens et artistes, nous sommes en train de façonner le futur de la musique métal. Le heavy métal n’a cessé d’évoluer depuis ses débuts. C’est encore le cas aujourd’hui. De nos jours, il y a énormément de formes différentes de heavy métal et c’est une excellente chose. Battle Beast mélange plusieurs univers musicaux en y ajoutant sa propre signature, le son qui fait sa marque de fabrique. Nous sommes une espèce de laminoir où fusionnent toutes sortes d’influences métalliques.
MIB: Comparaison n’est pas raison, mais la musique de Battle Beast me fait parfois penser au disco : toute cette énergie, tout ce glamour, toutes ces lumières. Sans aller jusqu’à qualifier votre musique de métal disco, j’y retrouve la même énergie positive…
Noora: C’est exactement cela notre but. Nous ne nous sommes jamais pris trop au sérieux. Pourtant, ce que nous faisons, nous le faisons sérieusement. Le credo de Battle Beast c’est de nous amuser et de faire passer un bon moment à celles et ceux qui viennent assister à nos concerts. C’est notre ADN et il se retrouve dans toutes nos compositions. Les textes, en revanche, ne parlent pas toujours de sujets joyeux. Certains abordent des thématiques sérieuses ou même des drames de la vie. Mais notre but est de distraire notre public et notre musique est le moyen d’y arriver.
MIB: Je pense que la magie opère car à chacun de vos concerts auxquels il m’a été donné d’assister, vous avez conquis le cœur de nouveaux fans. Beaucoup de gens ne vous connaissaient pas en arrivant et sont repartis conquis.
Noora: C’est très agréable à entendre, merci beaucoup.
MIB: Mais je pense qu’ils sont aussi séduit par toute l’énergie que vous déployez sur scène! Tu es une véritable bête de scène, selon l’expression consacrée. Où vas-tu chercher toute cette énergie ?
Noora: Je ne sais pas. C’est sans doute l’esprit de la bête qui sommeille en moi. (rit). J’aime tellement être sur scène avec le groupe et faire plaisir au public que je veux tout donner à chaque fois. Je veux être un exemple et montrer à chacun qu’il ou elle peut être la «bête» dans sa vie personnelle. Je veux donner de l’énergie aux gens qui viennent à nos concerts. Chaque show est un voyage qui doit leur faire vivre une expérience unique.
MIB: En tournée, te faut-il encore chaque fois 45 minutes de maquillage avant de monter sur scène?
Noora: Oui, comme je l’ai montré dans une vidéo postée sur YouTube. Je n’aime pas me précipiter. Il m’arrive d’être retenue par quelque chose d’autre et puis soudain de me rendre compte qu’il est temps de me maquiller. Je n’ai alors parfois qu’une demi-heure pour recréer la bête! Mais j’ai appris à prendre le temps de me préparer. La préparation ne se limite pas à la séance de maquillage dans l’heure qui précède notre entrée en scène. Elle commence au début de la journée, dès le réveil. Je me prépare mentalement dès le lever. Je fais attention à ce que je mange et à ce que je bois. J’essaie de faire un peu d’exercice. C’est une préparation assez complète finalement.
MIB: Cela ne doit pas toujours être facile en tournée, car les artistes ne dorment pas toujours assez dans le bus. Et puis il y a tous des contrariétés avec les réglages du son, etc.
Noora: Sans parler de l’air conditionné et des microbes différents dans tous les pays où nous allons. J’ai toujours peur de tomber malade pendant la tournée. En gardant un état d’esprit positif et en essayant de ne pas penser trop à tous les problèmes, je parviens à gérer plutôt bien! De toute manière, même si tu tombes malade, il faut essayer de ne pas le montrer. Les gens viennent te voir et attendent que tu puisses donner le meilleur de toi-même. J’essaie de ne jamais les décevoir. Quand je ne suis pas en forme, j’agis en professionnelle en ne laissant rien paraître et j’essaie de dormir le plus possible pour être mieux en forme le lendemain.
Je me suis bien préparée à la tournée en arrêtant de fumer, en ne buvant plus d’alcool, en faisant de l’exercice et en mangeant sainement. Bref, je fais le maximum pour être en pleine forme !
MIB: Il y a trois morceaux bonus sur le CD physique par rapport à la version standard. Que peux-tu nous dire à propos de ces morceaux ?
Noora: The Eclipse a été écrit par notre nouveau guitariste Joona Björkroth. C’est un morceau de type Berserk. C’est un thème que nous allons continuer à exploiter dans notre univers musical. Rock Trash est un morceau qui renoue avec les racines du rock. C’est un morceau fun à tous points de vue et cela s’entend d’ailleurs. God of War été écrit, quant à lui, par notre bassiste Eero (Sipilä). C’est un morceau de véritable heavy métal. Le choix des morceaux qui figurent sur l’album et ceux repris en bonus est le résultat d’une discussion avec notre label Nuclear Blast.
MIB: Merci beaucoup et bonne tournée à tous !
Noora: Merci à Music In Belgium et à très bientôt sur la tournée!
Battle Beast sera en tournée européenne avec Majesty en mars/avril 2017