Lucinda Williams, back to the roots
Le 25 janvier dernier, l’AB s’est métamorphosée en club country folk avec la venue de l’excellente Lucinda Williams. Compte rendu d’une soirée placée sous le signe d’une musique sortie tout droit du cœur de l’Amérique profonde.
Butch Norton (ex-Eels) (batterie, chant), David Sutton (basse), Stuart Mathis (guitare) sont les trois membres du groupe Buick 6 qui ouvre cette belle soirée à l’AB. Totalement inconnus au bataillon en ce qui me concerne, je me rends vite compte qu’il s’agit de musiciens aguerris qui s’avéreront être ni plus ni moins les musiciens de Lucinda Williams. Avant d’en arriver là, ils nous délectent de plusieurs compositions extraites de l’album «Plays Well With Others» sorti fin août 2015. Ils proposent surtout des instrumentaux dans lesquels on peut distinguer des éléments stoner, jazzy, folk et boogie texan. À une ou deux reprises, le batteur chante quelques notes et il siffle aussi. Original et inattendu.
C’est totalement par hasard qu’un matin, en écoutant la radio, j’ai entendu parler d’une certaine Lucinda Williams, chanteuse originaire de Lac Charles, en Louisiane (USA) et de son excellent album «Car Wheels On A Gravel Road» que je me suis empressé d’aller acheter chez mon disquaire. C’était en 1998. Depuis lors, j’avoue l’avoir perdue de vue. Quand j’ai appris sa venue à Bruxelles, je me suis empressé de me proposer pour couvrir son concert.
Me voilà donc à l’AB pour voir cette grande artiste américaine trop peu connue de ce côté-ci de l’Atlantique. En tournée pour la promotion de son nouvel opus «The Ghosts Of Highway 20», la sympathique Américaine débarque sans chichis sur la scène de l’AB pour nous faire voyager dans la musique du cœur de l’Amérique profonde. Pas de décorum inutile. Ce qui compte, c’est la musique et rien d’autre. Sa musique est un mélange de blues, de folk et de musique country. Sa voix rocailleuse est tout autant au service de compositions originales que de chansons «traditionnelles» (d’influence Cajun notamment).
Au programme de la soirée, cette musique qui est le cœur battant de l’Amérique et des chansons comme s’il en pleuvait: «Protection» (de l’album «Down Where the Spirit Meets the Bone» de 2014), «Crescent City» (de l’album «Lucinda Williams» de 1988), «Drunken Angel» (de l’album «Car Wheels On A Gravel Road» de 1988), «West Memphis» (2014), «Bus to Baton Rouge» (de l’album «Essence» de 2001), «World Without Tears» (de l’album «World Without Tears» de 2003), «The Ghost of Highway 20» (de l’album «The Ghost of Highway 20» de 2016), «If There’s A Heaven» (2016), «Lake Charles» (1998), «Temporary Nature (Of Any Precious Thing)» (2014), «Dust» (2016), «Are You Down» (2001), «Seeing Black» de l’album «Blessed» de 2011), «Unsuffer Me» (de l’album «West» de 2007), «Essence» (2001), «Changed the Locks» (1988), «Honey Bee» (de l’album «Honey Bee» de 2008) et en rappel «Hard Time Killing Floor Blues» (reprise de Skip James) et «Joy» (1998).
Malgré sa longue expérience de la scène, l’artiste est restée d’une extrême simplicité avec son public. Pendant le concert, elle remercie ceux qui ont pris la peine de venir la voir et raconte des anecdotes liées à ses rencontres musicales et à son père qui a manifestement joué un grand rôle dans sa vie. Elle plaisante aussi à propos de son pupitre où sont posées ses partitions qu’elle garde à portée de main comme «filet de sauvetage» en cas de trou de mémoire… Elle rend aussi hommage à quelques personnages comme l’auteur-compositeur-interprète Vic Chesnutt décédé le soir de Noël 2009 après avoir abusé de médicaments. Un brin de mélancolie sans sombrer dans une nostalgie larmoyante. Les morceaux s’enchaînent et j’ai l’impression qu’elle a une réserve presque inépuisable qui pourrait durer toute la nuit. En tendant bien l’oreille, on aurait presque pu entendre couler le majestueux Mississipi.
Contrairement à beaucoup d’artistes, Lucinda Williams n’a pas proposé une setlist centrée uniquement sur son actualité musicale. Elle a préféré offrir à ses fans une promenade dans son vaste répertoire de 12 albums couvrant la période de 1979 à nos jours. Et c’est un public conquis qui prend le chemin du retour non sans avoir acclamé comme il se doit les artisans de cette si belle fête musicale.
Photos © 2016 Hugues Timmermans