Nuits du Bota 2014 : Mac DeMarco, un troubadour des temps modernes
Cela fait tout juste dix ans que les Nuits Botanique se déroulent au mois de mai, passant du statut de dernier festival de la saison lorsque les feuilles s’envolaient à celui annonçant fièrement les manifestations estivales. Avec à la clé une affiche rafraîchissante, à l’instar de celle rassemblant sous le Chapiteau ce dimanche 18 mai Mac DeMarco et Cloud Nothings.
Mais c’est à des locaux qu’avait été confié le soin de lancer les festivités. Ou plutôt d’emmener le peloton puisqu’il s’agissait des Bruxellois de Mountain Bike. Ceci dit, plutôt que d’arborer un casque de cycliste et un short moulant, ils se produisent en tenue de basketteurs (qui, soit dit en passant, ne les mettent pas en valeur). Allez comprendre…
Constitué de musiciens chevronnés parmi lesquels on retrouve notamment le leader de Warm Toy Machine et l’ex-batteur de Thee Marvin Gays, il s’agit surtout d’une bande de potes dont le seul objectif est de s’éclater sur scène. Et cela fonctionne bien. Le public, par contre, semble plus dissipé et ne réagira que timidement à leurs compositions largement inspirées des sixties, la voix et les guitares vintage en tête. Une apparition furtive de Faustine Hollander (déguisée en basketteuse également) ne fera pas décoller une prestation de qualité, mais un peu trop linéaire que pour réellement passionner.
Changement radical de style avec Cloud Nothings, le trio emmené par Dylan Baldi qui a enregistré quatre albums en cinq ans, dont le dernier en date (« Here And Nowhere Else ») est sorti fin du mois de mars. En tout cas, une chose est sûre, ils ne prennent pas de détour et la manière dont ils vont démarrer leur set va en faire reculer plus d’un. Puissant d’un point de vue décibels et éblouissant via les effets stroboscopiques (un enfer pour les photographes), le show va clairement tenir toutes ses promesses.
Aussi brut (voire brutal) et grungy que Metz ou The Wytches mais en beaucoup plus abouti, la patte du leader se retrouve en filigrane dans des titres aux mélodies certes discrètes mais bien présentes alors que sa voix par moments maladroite leur confère un certain charme (« Psychic Trauma »). N’omettons pas non plus de souligner l’efficacité de Jayson Gerycz, le batteur qui multiplie les prouesses alors que le bassiste TJ Duke arrondit les angles.
En d’autres termes, ils sont tous les trois dans leur trip et cela décuple les sensations. On ne comprend d’ailleurs pas pourquoi « Stay Useless » n’a pas été un tube à l’époque alors que l’assourdissant « I’m Not Part Of Me » n’a rien à envier à un trio de Seattle récemment introduit au Rock ‘n’ Roll Hall Of Fame.
La tête d’affiche du jour allait donner une troisième direction à la soirée avec la prestation de Mac DeMarco, un Canadien dont le troisième album est encensé par la critique à défaut d’enflammer les charts. Pourtant, « Salad Days » n’est pas le genre de disque à s’incruster facilement dans l’inconscient. Au contraire, la première écoute paraît même complètement décalée. Et, à voir le bonhomme en chair et en os, on se rend compte que c’est bien le cas.
Bénéficiant d’un réel soutien de la part d’un public acquis à sa cause (rappelons qu’il avait d’abord été programmé à l’Orangerie avant d’être upgradé dans le Chapiteau qui affiche complet ce soir), il va assurer une prestation à son image, loin de toute considération trop sérieuse. Maniant l’humour avec subtilité, il conte presque ses compositions. A sa droite, son bassiste passablement éméché va tenir le crachoir également en en faisant parfois un peut trop. Bref, c’est party time sur scène.
Généralement courts et mélancoliques, les nouveaux titres permettent à l’ami Mac de montrer toute l’étendue de ses capacités vocales. « Blue Boy » sera ainsi généreusement retravaillé, l’excellent « Let Her Go » accentuera sa face sensible alors que « Passing Out Pieces » fera penser de loin à Damon Albarn. Sans oublier « Let My Baby Stay » dans une version exclusive en compagnie de Dylan Baldi qui traînait en bord de scène à ce moment-là.
Mais c’est lorsqu’il chante sans faire le pitre qu’il devient le plus convaincant. Il rend ainsi parfaitement justice à « Chamber Of Reflection », un des meilleurs extraits de « Salad Days ». Ce n’est cependant que de courte durée car il plongera dans le public pour un crowdsurfing lors du titre suivant. Le tout se terminera avec « Unknown Legend », une cover de son compatriote Neil Young, pendant laquelle il parviendra à dompter la totalité des spectateurs, leur imposant de s’asseoir à même le sol le temps d’un instant. Ce Mac DeMarco n’a pas fini de nous surprendre et à ce train-là, ces salad days vont définitivement appartenir au passé.