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DOUR FESTIVAL 2013 (jour 2) : de la chaleur pour Jacco Gardner, Mark Lanegan et les Vaccines


Vendredi 19 juillet, c’est parti pour la deuxième journée du Dour Festival. Pas un seul nuage à l’horizon et une programmation musicale lumineuse avec notamment Jacco Gardner, le Mark Lanegan Band et les Vaccines. Mais avant, un petit détour par l’exposition de tickets de concerts de notre ami Vincent Sougnez s’imposait. Une manière originale de fêter la vingt-cinquième édition du festival. Aux côtés d’affiches de l’époque, de coupures de presse et de tickets originaux, on a ainsi remonté le temps jusqu’en 1989. Seul bémol, le pauvre a dû souffrir dans son espace situé à quelques mètres de la Boombox (le seul endroit, avec le Balzaal) qui n’a pas eu l’honneur de notre visite.

C’est donc The Black Heart Rebellion qui a débuté notre journée sous la Cannibal Stage, la scène consacrée aux guitares cinglantes et aux voix viriles qui n’était pas active la veille. Le collectif gantois a récemment sorti un deuxième album, « Har Nevo », dans lequel a notamment trempé Koen Gisen (le mari d’An Pierlé). Le résultat n’a pourtant rien à voir avec les mélodies langoureuses de sa belle. Ici, on est dans du rentre-dedans et sur scène, la tendresse n’a pas voix au chapitre.

Il faut dire que les cinq musiciens sont regroupés sur un espace de 5m² et avec deux batteurs (dont un qui attrape de temps à autre une guitare), l’énergie se retrouve décuplée. Ceci dit, la voix du chanteur, puissante sans être agressive, apporte un certain équilibre et permet de se frayer un chemin plus aisé vers des paires d’oreilles moins aguerries.

Jacco Gardner, lui, puise ses influences dans l’insouciance des sixites teintées de psychédélisme et son premier album, « Cabinet Of Curiosities », se retrouvera plus que probablement très bien classé dans notre top de l’année. Pas mal pour ce jeune hollandais que personne ne connaissait encore il y a un an. Il était aux Ardentes la semaine dernière mais ne gardera sans doute pas un excellent souvenir de son passage en bord de Meuse vu que son set s’est arrêté brutalement suite à une panne électrique localisée…


Il avait donc l’intention de se rattraper et c’est ce qu’il va faire de bien belle manière. Dès la traditionnelle intro (la plage titulaire de la plaque), on a senti que quelque chose allait se passer. Le bonhomme affublé de son inamovible chapeau respirait la grande forme et, pour la première fois, ses compositions vont se détacher des versions du disque malgré le fait que pour les festivals, il a laissé tomber les projections. Un titre comme « Clear The Air » constitue la bande-son parfaite d’un après-midi ensoleillé alors que « Summertime » porte admirablement bien son titre avec des harmonies vocales judicieuses et que « Watching The Moon » s’affirme véritablement. Il reviendra au Botanique le 4 décembre. A bon entendeur…

Vu que l’on aura l’occasion de revoir Piano Club à d’autres occasions, on a filé vers la Petite Maison dans la Prairie où les Français d’Electric Electric débutaient leur set musclé. Ils ne sont qu’à trois sur scène mais font un boucan d’enfer avec un style musical personnel que l’on assimilerait à du post rock électro basé sur des percussions (mention au batteur hyperactif qui mouille littéralement son marcel). On pense à du Battles mais en beaucoup plus brut et noisy alors que les paroles (lorsqu’il y en a) sont noyées dans un brouhaha sonore impressionnant. Une belle claque dans la figure à l’heure du goûter.

C’est alors que l’on a pris le parti de profiter à fond de la densité et de l’éclectisme de la programmation en ne se fixant pas à une scène ou à un concert en particulier. Cela a débuté par la Cannibal Stage avec Skindred dont le look singulier des musiciens ajoute une touche de folie à leur rock dur aux influences multiples. Il suffit de voir le leader black rasta au pantalon blanc pour s’en convaincre tout en se laissant distraire par le batteur démonstratif. Musicalement, bien que le hip hop ne soit pas loin, le metal reste leur marque de fabrique et la fusion qui en découle amène une variation pas dénuée d’intérêt.

Au Dance Hall, les Courtraisiens de SX distillaient leurs mélodies pop new wave. Omniprésents en festival cet été (ils ont notamment ouvert pour Muse à Werchter Boutique, étaient à Rock Werchter et seront aux Lokerse Feesten), ils ont confirmé l’excellente impression qu’ils nous avaient laissée ici même en 2011. Le timbre de voix de la chanteuse Stefanie Callebaut, grave, voire soul quelque part entre Dusty Springfield et Zola Jesus en moins sombre apportent un réel plus à des compositions qui prennent de plus en plus d’assurance.

En tout cas, un qui n’a pas peur du ridicule, c’est bien Darwin Deez dont l’accoutrement de petit footballeur ne passe pas inaperçu, à l’instar de ses boucles et de son mini bandana. Si son indie rock avait les mêmes attributs, on aurait sans doute tenté d’en savoir davantage. Mais la curiosité nous a plutôt emmenés sous la Cannibal Stage à la rencontre du post rock métallique de Pelican. Les musiciens ont certes des qualités de virtuose et les riffs incendiaires plein de dextérité sont légion mais l’ensemble ne présente, avouons-le, pas grand intérêt.

Torche, qui leur succédaient, officient dans un registre plus grungy voire stoner. Le son délibérément crasseux et brouillon qui orne leur set avait tout à fait sa place sur cette scène, davantage grâce au volume sonore qu’aux solos de guitare cinglants. En revanche, Hatebreed, qui se produisaient sur la Last Arena, ont étalé leurs influences hardcore. Un chanteur (Jamey Jasta) déchaîné à la voix puissante et agressive, des guitares lourdes, un son assourdissant, des clichés et un hommage appuyé à Slayer (« Si tu te maries, assure-toi que ta femme écoute du Slayer », lancera le leader avant de reprendre « Ghosts Of War ») en étant les principaux ingrédients. Bouchons dans les oreilles indispensables.


La suite allait nous emmener sous la Jupiler X Marquee avec le Mark Lanegan Band. Ce type est tout simplement une légende. Après avoir emmené les Screaming Trees dans les années 90, il a toujours réussi à éviter la routine en collaborant avec Queens Of The Stone Age ou en s’associant avec Greg Dulli au sein de The Gutter Twins quand il ne faisait pas les yeux doux à Isobel Campbell avec laquelle il a enregistré deux splendides albums. Si sa dernière production en date le voit jouer avec Duke Garwood (« Black Pudding » est sorti au printemps), c’est son dernier album solo en date, « Blues Funeral », qu’il va mettre en avant ce soir.

Un album qui porte merveilleusement son titre tant sa voix rocailleuse semble provenir d’outre-tombe. Les atmosphères délicieusement sombres appellent presqu’au recueillement alors que les lumières rouges aussi statiques que tamisées ne feront qu’éclairer timidement la scène (notre photographe Olivier Bourgi pestera assez à ce sujet). En revanche, sa prestance naturelle impose le respect, lui qui ne s’encombre d’aucun instrument. Tantôt crooner, tantôt inspiré par Johnny Cash, il est d’abord et avant tout rockeur avec des parties nerveuses qu’il amène le plus naturellement du monde. Il sera de retour en Belgique (au Studio 4 de Flagey) le 30 octobre prochain et on ne peut que vous encourager à aller applaudir le phénomène.

Les Vaccines allaient constituer notre tête d’affiche du jour sur la Last Arena. Le groupe de Justin Young, en deux albums et un peu plus de trois ans, a réussi à se forger une place de choix dans le paysage musical rock indépendant anglais. Ainsi, « Come Of Age », a atteint la première place du hit parade britannique en septembre dernier. Depuis, ils ont continué à tourner inlassablement, au point de remplir des arènes que la plupart de leurs semblables n’imaginent toujours qu’en rêve.

Ce soir, ils vont entamer leur set pied au plancher avec « Blow It Up » et « Teenage Icon » volume dans le rouge (et une batterie un peu trop proéminente). Justin Young (désormais bien barbu) a beau chanter de manière hasardeuse, la conviction avec laquelle il aborde les compositions lui permet de passer outre cet handicap (cela n’a pas toujours été le cas). A côté de lui, le guitariste Freddie Cowan a sans doute eu une pensée pour son frère Tom qui a joué la veille sous la Jupiler X Marquee avec The Horrors.

Leur force ? Des chansons courtes (ils ont quand même joué 18 titres en une heure), énergiques et instantanément mémorisables. Des hymnes à la Ramones ou dignes du début de carrière des Strokes : « Wolf Pack », « No Hope », « If You Wanna », « I Always Knew ». La liste est longue… Seuls bémols, une version speedée de « Post Break-Up Sex » qui lui enlève une partie de son charme et un nouveau titre, « Melody Calling », pas (encore) convaincant. Le tout se terminera traditionnellement avec « Norgaard » sur les douze coups de minuit. Les Vaccines sont venus et ont vaincu.

On a ensuite laissé la place au monde électronique de la nuit après un petit détour par le bar du petit bois, un espace caché sur la plaine et accessible à un nombre limité de festivaliers à la recherche de calme et de vibes positives, le tout dans une ambiance reggae distillée par la Raggaravane. A peine installés que l’on faisait déjà connaissance avec un festivalier vétéran de 56 ans exilé au Luxembourg qui en était à sa 22e édition avant de taper la discute avec de jeunes Français tagueurs qui nous ont donné des cours de verlan tout en confectionnant la suite de leur trip. Il n’y a qu’à Dour que l’on vit des moments comme ceux-là…

Photos © 2013 Olivier Bourgi

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