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Elliott MURPHY – AB Box – 8 février 2003

Elliott Murphy. Jamais je n’aurais osé soupçonner une telle classe chez lui ! Le samedi 8 février, il a tout simplement donné un concert marathon divin. Di-vin !! Et avec un bel invité surprise en prime ! A vrai dire, depuis quelques années, il se produit assez régulièrement par ici, mais chaque fois, j’ai laissé passer l’occasion. Quel inconscient, je fis ! En ce début d’année 2003, c’est Elliott Murphy & Band qui sont annoncés, ce qui est chose assez rare puisque, depuis quelques temps, il a pris l’habitude de se produire en formules duo ou trio.

Donc, sur papier, ça commence bien. Ma première rencontre live avec lui – en écartant sa présence en tant que guest de Springsteen en ’99 à Gand – devrait donc promettre bien du plaisir. Et dans les conditions optimales de l’Ancienne Belgique, s’il vous plaît. Salle qui pour l’occasion a été réduite de moitié par un rideau rouge scintillant. Avec en plus des loupiottes au plafond, l’ambiance est déjà très intimiste dès le départ.

Les voilà qui débarquent sur scène. Elliott, Stretson rouge vissé sur tignasse blonde, et guitare électro-acoustique à la main. Et le Français Olivier Durand accompagné de la même guitare que le chef. Et c’est parti, à deux, pour « temple bar », premier extrait de son dernier opus. Et d’emblée, une évidence s’impose : c’est magnifique. Ces 12 cordes s’accordent à la perfection. Et dire que j’avais laissé passer intentionnellement ses précédentes venues en duo… Gros soupirs ! Cette voix (parfois proche de celle de Dylan, en version light). Cette présence. Cette clairvoyance. Et puis ces textes surtout.

Le genre de singersongwriter 5 étoiles. A placer sans hésitation aux côtés des Bob, Neil, Van, Bruce, Townes, Léonard & co. On croirait tout ce qu’il dit. Il ne reste qu’à acquiescer en coeur. Il n’y pas le choix, c’est ainsi. Il me raconterait la Bible, que je deviendrais catho. Enfin, presque… En tout cas, tu le mets au téléachat, j’achète sans hésiter le nouveau gymtonic ! Déjà, l’image est imposante d’elle-même. Guitare en bandoulière, harmonica, chapeau. Quand d’autres passeraient ainsi pour d’infâmes pecnots, lui, il impose le respect.

Seulement, comme il s’agit d’Elliott Murphy & Band, retrouvons-le ce fameux band ! Guitare, basse Fender, keyboards, batterie. A 5 sur scène donc. Les derniers albums seront passés en revue par quelques pièces judicieusement choisies. Je ne suis pas vraiment familier avec son répertoire, mais ces morceaux sonnent comme de véritables hymnes. Comme si cela coulait de source. Comme si ses chansons étaient entrées dans l’inconscient collectif.

Puisant allègrement dans son passé, Elliott n’oublie pas non plus les hits. « drive all night », « anastasia »,… sans oublier son « last of the rock stars », par exemple. Il a le choix en fait. Une bonne quinzaine d’albums à sa disposition. Un moment très intense sera atteint par l’interprétation de son « on elvis presley’s birthday ». Cette chanson est de toute beauté, dans mon top 10 assurément ! Cette chair de poule ! Cette classe dans le phrasé, dans le jeu, dans le texte. Immense.

Dans la lignée des singersongwriters, il n’hésite pas non plus à se lancer dans quelques boutades. Ou dans des épisodes savoureux de sa vie personelle. L’effet est garanti. Comme lorsqu’il évoque des souvenirs avec son guitariste, et que celui-ci lui répond habillement ‘i’m sorry, i was too young…’ Rires jaunes de Murphy suivi d’un détonnant ‘you’ll be sorry, you will…’

Toujours dans cette ambiance détendue, il introduit le classique blues « little red rooster » par quelques mots sur Bruxelles capitale du blues où il y a longtemps il eut l’occasion de discuter avec Willie Dixon. A moins que ce fut à Chicago, il ne se rappelle plus trop… Rires à nouveau. Et justement sa version de ce morceau de Dixon (bien que souvent crédité Howlin’ Wolf d’ailleurs…) fut gigantesque. Une des meilleures que j’ai entendues jusqu’ici. Avec quand même celles de Mick Jagger et Arno.

Et il ne sera pas avare de reprises, notre ami Elliott. J’attendais en croisant les doigts, un petit « blind willie mc tell » de Dylan, malheureusement, ce ne sera pas pour cette fois. Je devrai donc encore attendre pour l’entendre live celle-là. Par contre, ces mots, mais oui, ces mots !?! ‘It ain’t no use to sit and wonder why, babe It don’t matter, anyhow’. Mais c’est bien sûr ! ‘Don’t think twice, it’s all right’ de Mister Bobby !! Good idea !

Tout petit moment de flottement avec un corde qui sautera. Le temps de la changer… ‘Get a roadie’ ! criera un spectateur. Pas besoin de tout ça, l’Elliott ! Il fait tout tout seul. Ca me rappelle Frank Black qui remballait son matériel dans son camion… Ca donne un de ces cachets authentiques !

De l’authenticité, c’est tout à fait ça ! Son premier album sortait en ’73. Depuis, il a fait ce qu’il a pu, de label en label. De ville en ville. Ce fut difficile, mais jamais il n’a laissé tomber. Alors que ses collègues remplissent des salles, lui, il fait son possible pour remplir les clubs. Mais toujours avec une humilité, une simplicité, une honnêteté exemplaires. Aucun compromis !

Aujourd’hui, il est exilé à Paris, mais tout a commencé à New York. Il n’oublie pas d’ailleurs sa ville natale, par un poignant hommage nommé « ground zero ». Me semble que c’est le plus beau morceau entendu en souvenir du 11/09/01. Il n’en fait pas des tonnes. Juste ce qu’il faut. C’est d’autant plus prenant évidemment. ‘Have you seen my mother, have you seen my brother, etc…’

Place ensuite à un quart d’heure démentiel. Il nous raconte l’histoire d’une fille. Sur un ton limite spoken word, mais quand même accompagné par ses musiciens. Il s’agit en fait d’un medley. « house of the rising sun » d’abord. Ensuite ‘I wa-wa-wa-wa-wonder Why Ah-why-why-why-why-why she ran away’ qu’il se demande à la façon de Del Shannon. Cette reprise met la salle en émoi tellement c’est kitsch. Et puis vous savez comment elle s’appelait cette fameuse fille ? Gloria ! G-L-O-R-I-A ! Ambiance survoltée !

‘Let me introduce you a friend from New York…’ Mister Steve Wynn himself ! Pour une surprise, c’est une surprise !!! Quel rêve éveillé ! Steve Wynn rejoint donc le groupe pour un morceau, « sweet jane » du Velvet. Ils prendront chacun un couplet. La fiesta atteint là son apogée !

Il reprendra aussi Neil Young, celui d’After The Goldrush, par la chanson « birds ». Très bon choix, Elliott. Vous avez du goût. Il terminera sur le beat infernal cher à Bo Diddley enchainé à « not fade away ». Final sur les chapeaux de roues.

Après un set de 3 heures, d’une trentaine de morceaux et de 3 rappels, il quitte définitivement la scène essouflé. Mais le sourire jusqu’aux oreilles. Fier de lui. Qui ne le serait pas après cette victoire par ko ?

Lors d’une de ses interventions, il raconte que sur la route entre 2 villes, il fait parfois un petit topo sur sa vie. Et en arrive toujours à la même conclusion : what the ***** are you doing ?!?

Franchement, je l’ignore, mais qu’il continue ainsi. Dorénavant, je suivrai !

Elliott Murphy – Bruxelles – 08 février 2003

Yann

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