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Le deuxième M’anu’factur Rock Festival

Nantis d’une première expérience positive l’an dernier, la dynamique équipe de la Manuf’ a remis le couvert et a organisé ce samedi 13 février la deuxième édition de son festival au Marché Couvert de Hannut. Un festival qui vient compléter (et indirectement promotionner) leurs affiches trimestrielles toujours très alléchantes… Pour cette deuxième édition, ils ont réussi à gommer les légères imperfections de l’an dernier (à commencer par une affiche trop pléthorique) tout en conservant les idées qui en avaient fait un indéniable succès: une affiche éclectique, des groupes de qualité, un son limpide, une touche environnementale, un accueil chaleureux, un prix démocratique et surtout une organisation impeccable…

Comme l’an dernier, c’est à un groupe du cru qu’ils ont confié l’importante mission d’entamer les festivités. The Epicureans sont en effet originaires de Hannut et ils étaient hyper motivés au moment de monter sur scène, au son de « L’hymne à L’amour » d’Edith Piaf. Cela dit, leur style n’a rien à voir avec la légendaire chanteuse française. On a affaire ici à un vrai groupe de rock (imaginez le chanteur de Malibu Stacy au micro de Bloc Party), énergique à souhait et dont les compositions rock indé mâtinées de pop subtiles font mouche, même à première écoute. Outre un excellent guitariste (meilleur à la guitare qu’à la trompette…) et un batteur qui tient parfaitement le rythme, pointons également un bassiste dont l’instrument vert pomme flashy apporte encore un peu plus de couleurs à l’ensemble. Si on pouvait leur donner un conseil, ce serait de limiter les interventions entre les titres car par moment, cela faisait un peu humour à la Gauff’ au Suc’. Mais cela mis à part, on a assisté à un excellent set et on se réjouit de découvrir ce que l’avenir leur réserve…

Le second groupe de l’après-midi, Adequate, nous en avait mis plein les oreilles au Witloof Bar du Botanique en octobre dernier à l’occasion d’une des deux soirées Startin’ Pop. Ce trio liégeois démontre à quel point la bonne vieille formule guitare basse batterie fonctionne à merveille avec des musiciens complémentaires. En effet, le chanteur (et guitariste doué) tatoué jusqu’au cou se démène comme un beau diable (sur scène autant qu’en backstage, d’ailleurs…), le bassiste au regard malicieux ne reste pas en place lorsqu’il n’hurle pas des onomatopées dans le micro tandis que la batteuse frappe sur ses fûts avec une facilité déconcertante. Elle est de fait plus efficace (et plus jolie) qu’une certaine Meg White par exemple. Cela dit, leur set va quelque peu nous décevoir. Leur son s’est arrondi (sans s’adoucir pour autant) et ils proposent des compositions plus travaillées, émaillées de moments plus calmes. Ceux-ci tranchent avec les envolées agressives mises en avant par une voix qui l’est tout autant (lorsqu’elle monte dans les tours en tout cas). Le souci, c’est que ces moments calmes nous font perdre pied, alors que justement, ils pourraient se révéler magnifiques. Par ailleurs, on a également l’impression d’avoir senti un léger manque de motivation. A moins qu’ils ne soient en train de mu(t)er… A vérifier lors d’une de leurs prochaines étapes scéniques.

Place ensuite à The Mash, un groupe hutois qui est tout doucement en train de devenir « the next big thing ». Après avoir joué aux Ardentes et au festival de Dour l’été dernier, ils ont eu le privilège d’ouvrir pour Indochine à Forest National alors que le single « Good Day To Die » tourne en boucle sur les ondes. Tout roule pour eux, c’est un fait, mais à voir leur attitude, on a l’impression que ce succès est progressivement en train de leur monter à la tête. Cela dit, leur set sera efficace, avec un son puissant bien réglé et des compositions pop rock qui tiennent la route, même si elles s’avèrent parfois un peu téléphonées (on soupçonne une volonté avérée de présenter le produit le plus radiophonique possible). Se produisant en chemise blanche et cravate noire, un peu à la manière de The Jam (dont ils empruntent également la coiffure), ils vont récolter en cette fin d’après-midi un succès qui ne fera que leur donner un peu plus de confiance. Si toutefois ils pouvaient paraître un peu moins blasés sur scène…

La ville de Huy était particulièrement bien représentée cette année car les revenants de Showstar s’apprêtaient à monter sur scène. La dernière fois qu’on les avait vus, c’était il y a deux ans en première partie des Charlatans au VK et ils nous avaient déçus. Après une période relativement longue de silence, ils ressortent de leur tanière avec un troisième album, « Think Ringo« , qui sortait le surlendemain. C’est donc à un set truffé de nouveaux titres que l’on s’attendait, un peu à l’instar d’un soir de septembre 2006 lorsqu’ils n’avaient joué que des plages de « Dot«  alors qu’il ne sortait que quelques semaines plus tard. Ce soir, ce ne sera pas le cas, vu que le premier titre sera « Superlover » (« Mad On Your Sister » arrivera plus tard). En revanche, le reste du set se baladera dans les mélodies accrocheuses de « Think Ringo » dont on retiendra particulièrement les excellents « Residents Of The Lost Club », « Finger Generation » et le single « Gold Mine ». Le plus anglais des groupes belges va démonter une fois de plus son habilité à composer des morceaux aux mélodies catchy. Le leader Christophe Danthinne, bien que plus sobre que par le passé, va quand même s’amuser à prendre des positions bizarres, adopter quelques mimiques dont il a le secret et se perdre dans la foule de temps à autre. Gageons que lorsqu’ils maîtriseront parfaitement ces nouveaux titres, on retrouvera le Showstar des grands soirs.

Autre album qui sort le 15 février, soit deux jours après le festival, « Kazablanka », le deuxième opus de Hallo Kosmo, le projet parallèle de l’éminemment sympathique bassiste des Girls In Hawaii, Daniel Offermann (qui était déjà passé par un des concerts trimestriels de la Manuf’ en 2007). Entouré d’un Austin Lace, d’un autre Girls In Hawaii et d’un ex-Tellers, Hallo Kosmo est désormais un vrai groupe. Sur scène, ils s’appuient sur un visuel très coloré, puisque chaque musicien est associé à une couleur. Ils jouent devant un panneau correspondant à cette couleur et cela va jusqu’au choix du mousse du micro et des spots en passant pas le costume de scène ou les lunettes du batteur (qui le font toutefois ressembler à Michel Polnareff). Musicalement, cela part un peu dans tous les sens: rap germanique (« Weiter »), pop rock (« Sad Sad Sad »), électro pop (« Every Line ») ou dérision pop (« Money People »), mais toujours avec une constante qui privilégie la qualité et l’accessibilité des compositions. On aura également droit à une cover new wave bien ficelée (« Whip It » de Devo) alors que le glacial « Rockpolizei », chanté au vocoder va conclure une prestation puissante et efficace de bien belle manière. La meilleure du festival, sans aucun doute.

Entre-temps, le Marché Couvert s’était bien rempli au moment où les français de Dig Up Elvis allaient entamer leur set. Il est fort à parier que la plupart des spectateurs (euh… surtout des spectatrices) n’avaient pas grand-chose à faire de la musique du groupe mais étaient surtout venus pour leur leader, qui n’est autre qu’un certain Julien Doré. Rassurons les amateurs de rock (et décevons les midinettes), il ne chantera pas les compositions pop commerciales qui ont fait décoller sa carrière solo mais bien des titres plus nerveux, tout en démontrant combien sa voix convient aux deux styles, pourtant diamétralement opposés. A ses côtés, un groupe qui joue fort et bien, à l’instar de l’imposant bassiste et du guitariste (même s’il gratte lui aussi, la guitare du leader passe sensiblement inaperçue, au même titre qu’une choriste un peu inutile). Au rayon set list, retenons cette excellente reprise bien nerveuse du « I Need Someone » de Sharko ainsi que « Godspeed », un long morceau qui fait penser à du très bon TV On The Radio. En final, ils reprendront « I Predict A Riot » de Kaiser Chiefs, sans toutefois en prononcer le titre. Honnêtement, on s’attendait à pire…

Les anglais de White Rose Movement aiment visiblement bien la Belgique. Après le Riffs ‘n’ Bips en 2008, le PacRock et le Verdur Rock en 2009, les voici déjà de retour sur une scène belge en 2010. Ils ont profité de ces passages réguliers pour parfaire leur français, même si ce sont essentiellement des mots simples qu’ils utilisent (bien qu’on surprendra la claviériste à traduire un passage de « Small And The Witch’s Revenge »). Quoi qu’il en soit, c’était plus pour leur musique que pour leurs performances linguistiques que l’on était là ce soir. Une musique qui puise ses influences dans les contrées glaciales de la new wave du début des années 80, basée sur des sons électros sans pour autant négliger l’aspect humain de la chose grâce à d’excellents musiciens, à commencer par un batteur hors pair et un bassiste déjanté dont le look lui aurait permis de rejoindre le backing band de Marilyn Manson il y a quelques années. Reste le chanteur et la claviériste, tous deux arborant un regard froid qui va particulièrement bien à l’atmosphère dégagée par le groupe (le hit « Love Is A Number » ou le très Mission « Idiot Drugs »). Par ailleurs, par rapport à il y a quelques temps, la claviériste (toute en beauté et élégance ce soir) s’affirme au point de prendre le micro de temps à autre et de laisser son mini Korg au bassiste pour des morceaux de tuerie. Un groupe qui se bonifie au fil des prestations et qui en aura mis plein les oreilles à des spectateurs médusés par tant de classe naturelle.

Les Naive New Beaters avaient pour mission de faire la jonction entre le rock et l’électro. Et, honnêtement parlant, il s’agissait là d’un choix extrêmement judicieux. Pourtant, ici à Music in Belgium, on n’est pas vraiment dans le trip rap, mais joué comme ça, avec une guitare live cinglante qui apporte de la chaleur, un type qui lance des beats destructeurs au son léché et un chanteur MC qui se donne à fond, on ne peut que tomber sous le charme. En tout cas, ils ont mis le feu et on s’est retrouvé comme la plupart des festivaliers au milieu de la foule en train de se bouger au rythme des bombes efficaces lancées les unes après les autres sur le dancefloor. En effet, comment rester de marbre sur « Get Love », « L.A. Trumpets » ou « Can’t Choose »? Une découverte qu’il convient de partager avec le plus grand nombre.

La soirée s’arrêtait pour nous à ce moment-là. En effet, The Others et plus tard les Surfing Leons allaient maintenir les ravers en action jusqu’au bout de la nuit (quand on vous parlait de festival éclectique…). Cela dit, la Manuf’ a réussi son deuxième examen avec grande distinction, et on est d’office partant pour une troisième édition…

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