Saxon vs Iced Earth – Metal à l’ancienne, à l’Ancienne Belgique

Il fait froid en ce lundi 2 février 2009. Il fait froid partout en Belgique… partout ? Non, pas au numéro 110 du boulevard Anspach à Bruxelles. Ce soir, l’Ancienne Belgique est bondée et croyez moi… il fait chaud ! Très Chaud. Ce soir, 2 géants du Metal Traditionnel se sont donné rendez-vous chez nous. Iced Earth l’Américain et Saxon l’Anglais unissent leurs forces pour dégivrer nos oreilles. Probablement sous l’impulsion de sa maman qui avait dû lui dire : « Cut your hairs and get a real job » (combien de talents ont été tués dans l’œuf à cause de cette petite phrase incendiaire ???), Matt Barlow avait troqué sa légendaire chevelure rousse et son micro contre un képi et une matraque de la police américaine. Heureusement pour la communauté du Metal, les mamans ne gagnent pas toujours, et notre Matt est de retour à la tête d’Iced Earth. De son séjour dans la police, Barlow n’a gardé que la coupe de cheveux et c’est donc, tête rasée, qu’il déboule sur la scène de l’Ancienne Belgique. Comme le talent ne se mesure pas à la longueur des cheveux, le public l’accueille avec l’ovation qui lui est due. Le groupe avait beau l’avoir remplacé par un intérimaire de luxe en la personne de Tim « Ripper » Owens, tout le monde le sait, la voix d’Iced Earth, c’est Barlow et personne d’autre.

Fin 2008, le groupe de Tampa Floride, nous avait offert l’excellent « The Crucible of Man: Something Wicked Part 2 ». Il était temps de voir sur scène, si le Metal Cop et ses acolytes avaient encore la pèche. Iced Earth, c’est Matt Barlow, mais c’est aussi et surtout Jon Schaffer. Il est le compositeur principal du groupe. Iced Earth, c’est son bébé. Tout au long du set, il distille son étrange mélange de Metal Classique et de Trash rehaussé de passages acoustiques et épiques. Schaffer a l’air discret et un peu en retrait, mais il ne faut pas s’y fier, c’est lui le chef d’orchestre. Les autres membres d’Iced Earth ont beau bouger et faire tout leur possible pour se faire remarquer, on ne voit que Schaffer et Barlow.
Le troisième élément important du groupe, c’est son public. Iced Earth n’est pas un groupe qui attire un public de curieux. Il attire un public de fidèles, de connaisseurs. On ne vient pas comme ça à un concert d’Iced Earth. Il faut avoir préparé son sujet, parce que pendant le concert, il va falloir chanter. Pas de chorale sur scène comme à un concert de Therion. La chorale, c’est vous. Ce soir à l’Ancienne Belgique, que des connaisseurs. Une chorale fantastique pour épauler l’ami Barlow qui a parfois un peu de mal à reproduire les passages les plus aigus de leurs albums, ce qui n’échappe pas à l’œil sévère de Jon Schaffer qui ne peut s’empêcher de faire la moue lors de certains dérapages vocaux dans le morceau « Dracula ». Cela mis à part, Barlow tient une forme fantastique. Quand il chante au lieu de hurler, sa voix s’approche du divin, notamment sur les morceaux les plus épiques comme « Watching over me » ou « Melancholy (Holy Martyr) ».
Au final, un retour gagnant en Belgique (qui avait déjà été amorcé au Graspop en 2008) pour ce groupe légendaire qui aurait très bien pu faire la tête d’affiche de ce concert, mais qui a préféré laisser cette place à un autre groupe légendaire : Saxon.
C’est vers 21h30 que nos Anglais préférés montent sur scène. Première constatation : ils ont encore vieilli… 30 ans depuis la sortie de leur premier album en 1979, ça laisse pas mal de traces… Biff à l’air un peu mal à l’aise, engoncé qu’il est dans une veste un peu petite pour son corps de géant. Un autre « ancien » du groupe, Nigel Glockler, semble lui très à l’aise derrière ses fûts. Tim Carter, qui ne tient la basse dans Saxon « que » depuis 1988 a quant à lui une pêche d’enfer. Il aura même son moment de gloire sur l’introduction de « Dallas 1PM », un des classiques du groupe auquel il apporte un petit grain de folie. La dernière recrue du groupe Doug Scarratt, second guitariste soliste depuis 1995, assure bien son rôle. Ses duels de guitare avec Paul Quinn nous font presque oublier Graham Oliver son illustre prédécesseur.

Paul Quinn, qui dans les années 80 avait pris l’habitude de cacher sa calvitie avec une casquette, a enfin décidé d’assumer son physique et affiche fièrement un crâne nu comme un œuf, assorti d’une chemise noire qui lui donne plus l’air d’un bon père de famille que de l’icône du Metal qu’il est en réalité. Car, si le look ne suit pas, la musique, elle, n’a rien perdu de sa puissance du début des années 80. Au contraire, comme un bon vin, la musique de Saxon semble se bonifier avec l’âge. Les classiques ont une force incroyable et les nouveaux morceaux n’ont rien à leur envier.
Ce soir, Biff est venu vendre son nouvel album « Into the Labyrinth » sorti début janvier. Pas moins de 6 morceaux sur les 13 que comporte l’album seront joués. 6 morceaux sur les 14 morceaux de la setlist, c’est énorme et c’est tant mieux ! Parce que, voyez-vous, les nouveaux morceaux passent très bien sur scène. Certains d’entre eux sont déjà des classiques de Saxon en puissance, notamment le morceau d’introduction du concert : « Battalions of Steel », qui est un hymne épique à la gloire des fans de Metal, ou « Demon Sweeny Todd » un morceau rapide à souhait qui nous fait vite oublier les prestations vocales de Johnny Depp dans le film du même nom, ou encore le magistral « Live to rock » en rappel, qui bien qu’il aurait pu être tiré d’un album d’Accept ou même d’AC/DC est un formidable morceau qui vous trotte encore dans la tête bien après la fin du concert.

Les classiques ne sont cependant pas oubliés, « Metalhead », « Dallas 1PM » dont j’ai déjà parlé tout à l’heure, « Broken Heroes » un morceau qui date de la période la moins glorieuse de Saxon, celle où le groupe avait essayé de rendre son Metal plus commercial pour faire plaisir aux radios américaines, mais qui ce soir, notamment grâce à la basse détonante de l’ami Carter, retrouve toute sa crédibilité et prouve qu’il mérite bien sa place dans un set de vrai Metal.
Avant de nous offrir un final en beauté avec la trilogie de classiques Heavy Metal « Thunder », « Power and the Glory » et « Crusader » (cher à Bernard notre photographe), Biff frise l’incident diplomatique en nous gratifiant d’un « Merci beaucoup » qui étrangement sonne comme une insulte pour la partie « nord » de la salle. Remercions Biff pour l’effort linguistique en espérant que la prochaine fois, il nous remerciera en Anglais, en Chinois ou en Esperanto histoire de ne pas rouvrir de vieilles plaies qui ont décidément bien du mal à cicatriser.
En résumé, une petite heure et 15 minutes de concert, c’est peu pour un groupe qui a tant de classiques à jouer, mais bon, il y a encore de la route à faire pour rentrer chez nous et puis, demain c’est mardi, il faut aller bosser. On n’est plus tout jeunes, parce que, si ça fait 30 ans que Saxon joue, nous, ça fait 30 ans qu’on l’écoute. Allez, une petite bière et au dodo.
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Photos © 2009 Bernard Hulet
